retrouvailles (vendredi 06 septembre 2097 x la coloc)
la première semaine de septembre vient de s’achever, laissant derrière elle le huitième mois de l’année. août à été marqué par les vacances scolaires, et qui dit vacances dit retour en famille, à ithloreas. elle n’y va jamais de bon coeur, alexis. mais toute émancipée qu’elle est, il y a des devoirs auxquels elle ne peut se substituer: ses parents restent sa famille, envers et contre tout. le mois d’août fut donc terriblement long, et au bout de deux semaines là-bas, alexis avait déjà envie de rentrer à lunapolis. retrouver son vrai chez-elle, retrouver caspian, et pouvoir lui raconter autrement que par sms à quel point ses géniteurs étaient fatigants.
elle réussit cependant à tenir les deux semaines restantes; avant un retour assez brutal dans la capitale, suivi de près par la rentrée scolaire. sa quatrième année de droit commençait, et si les trois premières s’étaient bien passées, la jeune femme pouvait déjà sentir que le rythme s’était déjà accéléré. mais entre ses vacances et les cours, il y avait dans sa vie un invariant des plus importants: caspian. les deux colocataires n’avaient pas pû se retrouver lorsqu’alexis était rentrée, mais ils s'étaient réservés ce week-end. elle et lui, lui et elle. une soirée tranquille et agréable pour se retrouver après ce mois d’absence.
car l’été se meurt petit à petit et la routine reprend sa vie.
“salut !” qu’elle lance joyeusement en passant la porte d’entrée. “aaah, enfin le week-end !”
soupir de joie et de soulagement. ce qu’elle avait hâte d’être vendredi soir. les clefs sont déposées dans la boîte en bois sur le meuble de l’entrée, et la veste en jean accrochée au mur. le sac toujours sur les épaules, alexis se dirige vers le salon avant de s'effondrer dans le canapé.
“ça va ? t’as passé une bonne journée ?” c’est son regard doux qui se pose sur un caspian fraîchement arrivé dans la pièce. probablement venu la rejoindre après l’avoir entendu rentrer. “j’ai acheté du pop-corn pour ce soir !”
elle soulève son sac comme pour lui signifier que son achat est tendu, dans un sourire triomphant. sourire qui ne la quitte pas, chaleureux et rassurant et dirigé vers caspian. c’est une pensée qui lui traverse bien souvent l’esprit, mais ce qu’elle est heureuse de vivre avec lui, alexis.
“tu as décidé de ce tu as envie qu'on mate ?”
l’horloge du salon indique 18h30, synonyme du début de la soirée. ils se sont promis une soirée rien que tous les deux, à se raconter leur vie tout en riant devant un film. profitant tout simplement d’être ensemble et de se retrouver un peu.
retrouvailles (vendredi 06 septembre 2097 x la coloc)
la lèvre mordue lorsque caspian prend un léger ton de serment. le regard un peu désolée, mais un grand sourire sur le visage, presque amusée. parce que ce n’est pas la première fois qu’il lui dit, ni la dernière fois qu’elle l’oublie. alors, d’un air entendu, elle défait ses baskets et se lève pour les poser dans l’entrée, à leur place.
““woups, pardon. promis je me suis essuyée les pieds avant d’entrée !”
et c’est la vérité. car si caspian est un grand maniaque, alexis n’est pas en reste non plus. alors certes, pas autant que lui, elle est bien plus laxiste, mais elle reste une personne organisée qui ne supporte ni la saleté, ni le bazar. mais bon, parfois, prise dans l’enthousiasme de la vie, elle oublie des petits détails.
““oh, j’imagine que ça ne devait pas être palpitant. rien d’exceptionnel aujourd’hui ?”
elle est revenue dans le canapé, à ses côtés. sourire conciliant lorsqu’il lui parle de sa journée. alexis ne le dit pas, mais elle est fière de lui. et bien qu’il parle parfois de son boulot d’un air las, l’hérissonne serait bien incapable de faire la même chose que lui. elle admire vraiment sa motivation et sa détermination, d’autant qu’elle sait que ça n’a pas été facile pour lui, à la milice.
““héhé, j’ai parfois de bonnes idées !” elle rit quand il attrape le pop-corn et lui ébouriffe les cheveux. ““hm… la guerre des écrevisses plutôt ! il est drôle ! massacre chez les loutres, on sait tous les deux toi comme moi que je vais avoir peur à la moitié du film et me cacher sous le plaid donc...”
les films d’horreurs, c’est pas trop son truc. ça marche beaucoup trop sur elle pour qu’elle puisse vraiment les apprécier. le moindre bruit trop fort, le moindre screamer et la moindre musique angoissante la fait trembler de peur. alors, elle évite autant qu’elle peut.
““aah, charmantes, c’est le terme…” sourire complice. ““non, écoute… je suis partie début août du coup, et j’y ai passé 4 semaines. les deux premières, c’était ok. il y avait ma famille, et la présence de mes cousins rendait le tout un peu moins imbuvable. on est allé aux plages d’opale et malgré le monde… c’était vraiment magnifique !”
elle doit admettre qu’ithloreas est une ville qui ne manque pas de charme, et la ville portuaire lui manque, parfois, quand elle se sent perdue au milieu des immeubles de lunapolis.
““et puis après, ils sont partis, et j’étais seule chez moi. c’était beaucoup plus compliqué. comme à leur habitude, ils ont été super chiants. je ne sais pas si c’est parce qu’ils n’ont toujours pas digéré mon vœu, bien que ça en deviendrait inquiétant puisque ça fait..” elle compte sur ses doigts. ““7 ans… mais ils n’arrêtent pas de douter de mes études. j’en ai écopé, des critiques, sur le fait que je démarrais mon master cette année… comme s’ils étaient persuadés que je n’allais pas y arriver.”
la voix qui se brise légèrement sous le coup de l’émotion. pas très longtemps, parce qu’alexis se ressaisit vite, mais assez pour faire varier sa voix quelques secondes. elle ne l’admet pas, mais c’est le genre de remarque qui la blesse. et malgré la distance qu’elle a prise, malgré la carapace qu’elle s’est formée… parfois, elle aimerait bien que ses parents la soutiennent dans ce qu’elle fait.
“ah et !” le ton joyeux revient, comme pour oublier sa faiblesse dévoilée. ““on a quand même un progrès ! ils ont enfin compris qu’on n’était pas en couple toi et moi, mais qu’on était en coloc. ça leur aura pris un an et demi quand même… je pense qu’on peut les féliciter sur ça.”
elle rit de bon coeur avant d’attraper la bière qu’il lui tend.
“santé, caspian !” c’est rempli d’affection quand elle murmure son nom. “et toi alors? tu as pris une semaine de congé si je me souviens bien ? ou c’était plus ? ça a été ?”
elle porte la bouteille à ses lèvres, le regard posé sur caspian. elle se sent bien, auprès de lui. rassurée, écoutée, et en sécurité. elle se sent dans son foyer.
retrouvailles (vendredi 06 septembre 2097 x la coloc)
elle est toujours impressionnée par les journées de caspian, même pour des simples patrouilles. parce qu’il s’y passe toujours quelque chose. et même si ça semble logique, alexis ne fait pas souvent face à des situations qui requièrent l’intervention de la milice. sa vie d’étudiante est tranquille, et les seuls moments un peu agités sont les soirées. mais là encore, il ne s’y passe pas grand chose. peut-être que le fait qu’il lui en parle là met face à la réalité et la confronte dans ses idées d’une capitale tranquille ? peut-être que ça perce sa bulle et lui fait rendre compte que, non, les hauts quartiers de lunapolis ne sont pas exemptés de violences, de misères et de problèmes. quoiqu’il en soit, ça lui fait toujours un petit quelque chose, et cette remise en question de son paradigme n’est pas pour lui déplaire.
mais la conversation sur sa journée prend vite fin pour revenir sur les vacances, officialisant au passage le film qui passera ce soir d’un cliquetis de bouteilles qui s’entrechoquent. et puis caspian réagit sur ses vacances, et alexis peut sentir son implication dans sa voix. et ça la touche, énormément. ça la touche d’avoir quelqu’un dans sa vie à contre-courant de ce genre de remarques. quelqu’un qui croit en elle. quelqu’un qui la soutient. alors elle vient se blottir contre lui, pose sa tête sur son épaule. pour le remercier silencieusement. d’être là.
elle rit à sa remarque, sans trop y croire. elle ne se considère pas meilleure qu’un autre, mais que caspian le pense lui réchauffe le coeur.
“hahaha, grave ! en plus ça m’étonnerai même pas qu’on se rende compte qu’ils traînent dans de sales histoires un jour...m’enfin ! quand j’aurai mon diplôme et un travail, ils ne pourront définitivement plus rien dire.”
c’est peut-être illusoire, mais alexis voit la fin de ses études comme le stade ultime de sa liberté. parce qu’elle aura fini, parce qu’elle aura un diplôme et un boulot. parce que ça sonnera le début de son indépendance financièrement totale. la fin de sa vie d’étudiante. elle à hâte. et peur aussi.
“tu te vois où dans 2 ans ?”
alexis murmure, un peu dans ses pensées. la véritable question qu’elle voulait poser, c’est: “on sera toujours ensemble, dans deux ans ?”. mais elle est trop lâche pour poser ça de but en blanc. alors elle demande, évasive, un peu dans ses pensées. c’est son soupire qui la tire de ses rêveries. elle relève la tête, plonge ses yeux dans les siens, et écoute avec un sourire compatissant sa semaine chez les matkovic.
“oof… j’imagine. ça ne devait clairement pas être évident surtout s’il y avait beaucoup de monde et que tu devais être en représentation constante… et vraiment pas cool, tes parents… je ne comprends pas ton père…”
“tu es super, pourtant.” sont les mots qu’elle voudrait ajouter mais qu’elle n’arrive pas à faire traverser ses lèvres. trop timide. alors elle se contente d’un regard plein d’affection et de soutien. si ses parents sont des gros idiots, ceux de caspian ne sont pas mieux. elle les trouves terriblement injustes et hypocrites, incapable de reconnaître la valeur de leur fils. et pourtant, alexis, elle le sait qu’il en a, de la valeur. elle le sait qu’il est fort, courageux, généreux et doué. elle le sait qu’il mérite, qu’il se démène pour atteindre ses objectifs. elle le sait. et parfois, elle aimerait bien que son père aussi, le réalise. parce que ce n’est pas juste.
“on est mieux ici, hein ?” elle se presse à nouveau contre lui, avalant une nouvelle gorgée d’alcool. “tu veux que j’aille préparer les popcorns pendant que tu prépares le film ?”
elle demande, un peu plus joviale, pour continuer sur une note plus positive.
retrouvailles (vendredi 06 septembre 2097 x la coloc)
elle rit d’autant plus à cette phrase qu’il lance un peu au hasard, sans trop réfléchir. peut-être qu’il ne mesure pas la portée de ses mots, caspian, mais pour alexis, le “on” veut dire beaucoup. le fait qu’il en parle avec légèreté, pour rire, et sans trop réfléchir aussi. parce que cela veut dire que c’est naturel. et alexis, ça la touche de voir qu'inconsciemment ou non, il l’intègre totalement à son futur.
“hahaha, allez, on fait comme ça ! tant qu’à faire, je pense qu’on peut rajouter une salle de sport rien que pour nous au sous-sol, et une bibliothèque à l’étage qui fera rougir n’importe quelle collectionneur de l’ombre et des roses ! on aura la belle vie, et on sirotera un cocktail au soleil pendant qu’ils jubilent de notre réussite sans eux.”
légère insistance dans sa fin de phrase, sans même s’en rendre compte, avant de rire à nouveau. elle ne sait pas ce qu’elle dit, mais quitte à imaginer une villa de luxe, autant y aller à fond. mais elle se presse encore plus contre lui, alexis. se noyant presque entre caspian et la multitude de coussins de leur incroyable canapé. elle sourit doucement, hoche légèrement la tête.
“c’est vrai, deux ans, c’est court. moi dans deux ans je serai diplômée… je m’imagine en train d’ouvrir mon cabinet d’avocat. et être ici, avec toi, à trinquer, tout en essayant de trouver un nom pour le cabinet !”
le cœur toujours réchauffé d’être sur la même longueur d’onde que lui. chaleur qui laisse vite place à un pincement quand elle l’entend parler de son frère. alexis ne comprend décidément pas comment son père puisse faire autant de favoritisme entre ses deux enfants. c’est injuste, complètement injuste. elle se dit parfois, amèrement, qu’elle a de la chance d’être fille unique. parce que même si elle a un mauvais traitement, au moins c’est le même pour tout le monde puisqu’elle est seule. elle grince un peu des dents en imaginant ce que sa vie aurait été si elle avait eu un petit frère, mais chasse ces pensées aussi vite qu’elles sont arrivées.
“clairement. en plus, t’es pas n’importe quel soldat. tu peux être fier de ton parcours. c’est injuste, vraiment. je trouve que ça n’a pas de sens.”
elle ne rentre pas dans les détails sur son parcours. sait que l’issue de sa promotion est un sujet délicat. entre les efforts de caspian pour se hisser dans le haut du classement, balayer d’un revers de la main par l’influence de son père. et ça l’énerve, alexis. et sûrement caspian aussi. alors ils se lèvent, après une douce étreinte, de manière synchronisée.
“allez, c’est parti !”
rire léger alors qu’elle se dirige vers la cuisine ouverte sur le salon, le paquet de popcorn entre les mains. elle lit la notice avant d’ouvrir le ouvre le micro-onde pour le mettre dedans et attendre les minutes réglementaires. pendant ce temps, caspian à tout le loisir de préparer le film en entendant les grains de maïs s’éclater dans un boucan pas possible.
“et voilà ! j’espère que t’es prêt pour la meilleure soirée film de ta vie.”
alexis revient, toute fière, un saladier de popcorn entre les mains qu’elle dépose sur la table basse. elle se réinstalle dans le (trop) grand canapé, la bière dans une main, et l’autre disponible pour grignotter.
“tu veux faire un jeu ? genre un bingo à boire selon ce qu’il se passe dans le film ? j’en ai vu des drôles sur facebouc. après on peut aussi le regarder tout à fait normalement, bien évidemment !”
clin-d’oeil complice, une nouvelle gorgée de houblon en bouche.
retrouvailles (vendredi 06 septembre 2097 x la coloc)
elle attend avec impatience la proposition de nom que caspian va trouver pour son fameux cabinet. elle le connaît, à force, et elle sait qu’il peut être taquin quand il veut. ça ne manque pas. en entendant sa proposition, alexis ne peut s’empêcher de rire avant de lever les yeux au ciel.
“tu sais, caspian, dans “mon futur cabinet”, il y a le possessif “mon”.” elle lui tire la langue, taquine à son tour. “bon après, c’est vrai que je t’aime beaucoup et que tu es une personne formidable, alors peut-être que je peux concevoir de te faire hommage dans le nom de mon cabinet… j’y réfléchirai !”
petit pic plutôt gentil. il y a du vrai dans ce qu’elle dit. elle l’aime beaucoup. deux ans déjà, qu’ils se connaissent. et un an et demi maintenant qu’ils vivent ensemble. ça en fait, des souvenirs. des après-midi à tenter de cuisiner un plat nouveau, des soirées à regarder des films et à discuter, des sorties en villes la journée et au bar la nuit.
le regard malicieux laisse place à un regard tendre qu’elle dépose sur caspian. elle sourit doucement en repensant à tout ça. parce qu’au final, il a toujours été là, caspian. à ses côtés, à la soutenir et à l’écouter. c’était parfois même le seul à se tenir debout auprès d’elle. et pour ça, elle ne peut que le remercier. sans lui, la vie dans la capitale n’aurait pas été aussi douce.
“ah oui, tu es audacieux…” rit de nouveau à sa proposition. elle sait pertinemment que c’est une très mauvaise idée et qu’ils le regretteront le lendemain, mais elle s’en moque. “okay, ça me va ! pas sûre de tenir jusqu’à la fin du film, mais ça promet d’être amusant !”
et voilà que le film se lance. alexis laisse caspian s’installer dans le canapé comme il veut, et elle vient se blottir contre lui, sa bière à la main et le bol de pop-corn entre leurs jambes.
“bon film !”
rire, bière, pop-corn et écrevisses en perspective. la définition même d’une bonne soirée. blottit contre caspian, alexis est tout sourire, heureuse de ce petit bonheur simple. c’est un joli moment de retrouvailles.