« Ouais, t’as raison. »
Une phrase qu’elle entend souvent, qui hante parfois ses petits moments d’incertitude. « T’as raison, » qu’on dit, et pourtant la voilà qui en doute. Et à chaque fois que ces mots se font entendre, c’est un soupçon un peu plus fort, un peu plus intrusif, un peu plus angoissant qui s’immisce dans l’inconscient, qui remonte à la surface plus tard. Comme une pensée noire, le genre de choses auxquelles on ne veut jamais penser, qui s’impose malgré tout à sa pauvre victime. Un cycle terrible et, aux yeux de certains, sans fin.
Heureusement pour Aadhya, celles-ci ne feront surface que plus tard – le jingle d’une sonnerie de téléphone la tire d’une sorte de transe dans laquelle elle n’avait pas réalisé s’être plongée. Si la confusion brille un instant dans son regard, celle-ci disparait bien vite lorsqu’elle tourne la tête, observe Loupiot alors que lui fixe l’écran de son portable. Regard sombre suit ses mouvements un instant, sourit lorsqu’il lui montre rapidement que c’est « Maman » qui appelle.
«
Je comprends, t’en fais pas. »
Aadhyasri, elle comprend très bien, même. Ça lui rappelle les appels de Maman, ceux de Papa, ceux des frères qui ont oublié leur goûter à la maison. Les appels où on l’emmerde pour qu’elle revienne à la maison pour une raison nébuleuse, ceux où on lui demande de passer par la boulangerie prendre quelque chose pour le souper (comme s’ils n’avaient personne à envoyer faire cette course à sa place).
Le devoir qui appelle, comme l’a si bien dit Loren.
Mais elle sourit, lâche un petit rire lorsqu’il ose l’enquiquiner un peu. Comme si elle ne le faisait jamais.
«
Oh, j’ai besoin d’une raison valable pour venir te voir, maintenant ? »
Elle glousse, Aadhya, un peu comme une gamine trop joviale, sourit de cet air solaire qu’il lui arrive de porter par moments rares. Et la voilà qui s’accroche au bras de Loupiot.
«
Ça me ferait bien plaisir que tu me raccompagnes, oui. Et t’inquiète, je me ferai une note ‘Inviter Lo’ au resto bientôt’ dans mon calendrier. Comme ça, je ne l’oublierai pas. »
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