Caractère
Râleur // Bon public // Touche à tout mais bon à rien // Humour discutable // Gourmand // Maladroit // Distrait // Bavard // Sens de l’orientation catastrophique // Bourru // Franc // Blasé mais encore capable de s’émerveiller // Fleur bleue inavouée // Malicieux // Soumis à l’autorité // Protecteur // Tendre // Père poule // Commère // Passionné de jeux vidéos // A un peu lâché le sport mais tente de s’y remettre // Fidèle // Avenant // Bienveillant // Optimiste // Désinvolte // Désordonné // Coquet // « D’jeuns »

Jayson, c’est l’homme qui ouvre à l’aube son salon de thé.

Une ancienne galerie d’art, celle de ses parents. Il reste quelques tableaux d’ailleurs, le long des murs : les paysages représentés vont de l’océan aux plus hautes montagnes.

_ Un jour, je visiterai tous les coins qu’ils ont vus.

Sa voix est rauque, grave, personne ne l’écoute – personne n’est là. Mais Jayson a pris l’habitude de se parler tout seul. Tout sourire, il allume la télévision, met les informations, vérifie que les consoles sont bien reliées. Un hochement de tête, il rejoint ensuite le comptoir, y pose les pâtisseries, en prend une qu’il grignote avec un café.

Jayson, il est bavard, et au courant de tout. Il accueille les visiteurs avec le sourire, les conseille sur les coins à voir ou balance les rumeurs qu’il a entendues. De l’alcool ? Il n’y en a plus depuis longtemps dans son bar.

Son fils descend les escaliers, fils qu’il accueille d’une main glissée dans sa tignasse. Son fils sourit, s’installe devant la console, père et fils échangent quelques remarques complices.

Jayson, parfois, il prend un moment pour lui. Il monte à l’étage, fume de sa vapoteuse depuis la fenêtre, il regarde l’horizon. Parfois, il s’installe devant l’ordinateur, allume sa webcam et part pour quelques heures, dans un autre monde, une autre histoire.

Sa communauté, elle est de plus en plus nombreuse. S’amuse de ses grimaces. Des difficultés que l’homme rencontre face à des boss périlleux, des jeux de plateforme (ces satanées distances, son astygmatisme ne l’aide pas à les percevoir correctement !), et ses victoires, Jayson les fête en bondissant sur son siège. Levant les deux poings vers le ciel et criant sa victoire. Parfois, il s’étend sur son canapé et se repose, un livre quelconque entre les mains. Philosophie, livret technique de la machine à laver, recette de cuisine, son répertoire d’anecdotes alimenté par cette curiosité insatiable. A la qualité, il a privilégié la quantité. Au moins, ça alimente les discussions à son salon de thé. Il a ses petits habitués.

En fin de journée, c’est à quelques amis qu’il apporte les invendus. Des personnes sans domicile fixe, des chats de gouttière, des fois les amis affamés de son fils. Qu’est-ce que ça mange à cet âge-là ! Mais lui n’est pas mieux. Il a toujours de quoi grignoter sur lui.


Détails physiques
1 m 75 o 88 kilos ou 90 il ne sait plus o Des épaules solides, mais les années ont adouci et épaissi son tour de taille o Souvent mal rasé o Cheveux noirs, progressivement poivre et sel o Yeux bruns, souvent cernés o Quelques cicatrices, sur les bras et le visage, estafilades aux 1000 histoires o Traits taillés à la serpe, musculature autrefois dessinée o Articulations à présent emplies de sable o Mains couvertes de corne o Depuis quelques temps, il lui arrive de se maquiller, cils allongés, fond de teint, trait de crayon sur ses lèvres discrètes o Veste en cuir ou en jean, t-shirt rouge un peu serré, a du mal à avouer qu’il prend du ventre et de l’âge o Voix rauque, ancien fumeur o Préfère la vapoteuse et tous ses parfums sucrés o Avait les oreilles percées, elles se sont refermées o Quelques tatouages cachés sous son haut, période passée qu’il veut oublier o Mains habiles, parfois, si tremblantes o Toujours, gestes tendres, les mains épousent les formes, les joues, tapotent les épaules o Parfum d’automne, inscrit dans sa peau, odeurs douces mêlées d’épices, cannelle et caramel

 Comment on se connecte sur Hamchip? Hamsheep ? Bref, ta merde là !

Jayson râle.

Ses sourcils sont froncés, mais ses yeux sourient. Son fils, près de lui, pousse un soupir exaspéré.

_ Hamstream, papa ! Comme un hamster et un stream ! C’est pas si dur à se souvenir rah !

Son fils se penche, pianote sur l’ordinateur, sous le regard observateur de son vieux père.

_ C’est quand même dingue que t’aies bien plus de viewers et de like que moi…

_ Que veux-tu… Faut croire que j’suis meilleur que toi aux jeux vidéo !

_ C’pas pour ça ! A tous les coups, c’est ton charme d’homme mûr… Méfie-toi des fans…, se moque gentiment son fils.

_ D’homme mûr ? P’tit con va, bougonne Jayson, ébouriffant ses cheveux. Son fils se dégage d’un geste du bras, lui adresse une œillade malicieuse.

_ Ouah ! T’as même des subs !

Subs ? Jayson veut conserver sa dignité, aussi fait-il mine de savoir ce dont il s’agit. Il hoche gravement la tête en croisant les bras sur son torse.

_ Eh oui, eh oui, c’est ça d’être bon…

_ Prends pas la grosse tête.

Jayson ricane et se redresse finalement. Il fait quelques pas dans la chambre de son fils, observe les étalages, les mains sur ses hanches.

_ T’as enlevé la photo de ta mère ? S’étonne Jayson en clignant des paupières. Son fils ne répond pas. Jayson tourne les yeux vers lui. Il hésite, mais ne répète pas sa question. Ca ne le regarde pas. Il essaye de s’en convaincre, alors qu’il masse songeusement ses mains douloureuses, baissant songeusement les yeux. Il remarque un sac plastique, oublié au sol. Il se penche pour le ramasser.

_ C’est ton repas ? J’vais le descendre.

_ Okay pap’ !

Jayson ouvre le sac. Un silence.

_ Euh. C‘est quoi c’truc, gamin ?

_ Quoi ?

L’adolescent se retourne. Ecarquille les yeux.

_ Ah merde…! Laisse échapper le jeune homme. Il se dresse d’un bond et se précipite sur son père pour lui arracher l’objet des mains. Jayson garde les yeux grands ouverts et ne bronche pas.

_... Qu’est-ce que c’est ?

_... Ca s’voit pas ? Du mascara. C’est pour euh. Une amie.

_ Oh.

Le père et le fils restent à s’observer. Ils se fixent. Intensément. Et c’est Jayson qui rougit en premier. Il lève une main, mal à l’aise, la glisse dans ses cheveux, un soupir lourd s’arrache de ses lèvres.

_... Tu sais en mettre ?

_ Quoi ? S’étrangle l’adolescent.

_ J’sais pas enfin je… tu crois que… tu voudrais m’en mettre ?

_... Toi ? Papa ? Du maquillage ?

_ Bah j‘sais pas, pour essayer. Comme les jeux, ça, j’ai bien aimé. J’aimerai p’t’être bien ça aussi.

L’adolescent entrouvre les lèvres. Les referme. Jayson soupire.

_ Laisse tomber.

Mal à l’aise, l’homme se détourne et va pour s’éloigner. Mais son fils le rattrape par le bras.

_ Attends papa, reste ! Assieds-toi, je… On va essayer. Au pire, tu pourras pas être plus moche.

_ Hey, fais gaffe à ce que tu dis gamin, tu me ressembles plus à moi qu’à ta mère !

Jayson s’assoit sur le canapé. Son fils se penche sur lui, lui demande d’ouvrir les yeux, de fixer le plafond. La séance de maquillage dura une demi-heure, avant que Jayson ne puisse s’observer dans le miroir. Plus de cernes, plus de cicatrices. Une peau apaisée, des cils de biche.

Son fils se glisse près de lui, observe le résultat dans un sourire satisfait.

_ Bon, j’ai réussi à faire en sorte que le fond de teint s’accorde à ta peau, c’était vraiment pas gagné…

Jayson effleure sa propre joue. Du coin de l’œil, il aperçoit la fierté de son fils. L’adolescent sourit. Un sourire sincère. Soulagé.

_ Comment tu te trouves papa ?

_... Beau, avoue Jayson d’une petite voix, Merci gamin.

L’adolescent n’est pas dupe. Il hésite mais pose sa tête sur l’épaule de son père.

_ Merci à toi papa. Merci beaucoup.

_ Ne me remercie pas. Je suis heureux de partager toutes ces choses avec toi. Bon tu as réussi à te connecter sur Hamstip?

_ Papaaa ! T’es nul ou tu fais exprès ?

Jayson rit.

Il ne s’est jamais senti aussi beau. Aussi bien.

_ Allez, laisse-moi un moment, j’arrive de suite.

Son fils sort docilement de la pièce. Jayson s’observe.

_ Bravo Jayson, se félicite-t-il.

Cela faisait des mois que son fils vivait chez lui à présent. Des mois où il n’avait pas touché à l’alcool. 200 jours de sobriété. 200 jours où il réapprenait à vivre.

///

ses voeux, c'est à la Maison des Roses et de l'Ombre qu'il les a faits. Dès ses 14 ans. Par devoir, par conviction, par obligation. Les temps ont changé. Lui aussi. Il n'est plus ce qu'il était - mais il reste le fils de ses parents. Eminents artistes, d'un sophistiqué qui l'a étranglé, dont il s'est au plus vite débarrassé. Mais il reste un peu d'eux. Dans son salon de thé, les tableaux qui ornent les murs coûtent probablement plus chers que toutes les consoles qu'il a réunies ! Ses relations ne sont plus ce qu'elles étaient, mais certaines d'entre elles lui rendent encore visite, sous couvert de la nuit.

Il ne dort toujours que d'un œil. Par souvenir, d'un passé inscrit dans sa chair, de cicatrices qu'il effleure du bout des doigts. Dissimulées sous les tatouages, la honte et les pleurs qu'il n'a jamais avoués. Réfugié contre un mur, quand sa femme levait le bras, l'assassinait de paroles haineuses, d'un mépris dégoulinant, ses griffes empoignant ses mâchoires. La barbe, dressée entre elle et lui, barbillons d'un hérisson, incapables de le protéger.

Soumis. Soumis à son autorité.

Comment l'amour peut si mal virer ? Qu'est-ce qu'il a merdé ?

Les regards de certains, à l'adresse de ses bleus, de ses griffures, qu'il justifie par un murmure. "Ma femme est dure".  Le mépris, les moqueries, suffisent à ce que le silence perdure. La vérité, enfouie, enterrée, entre ses lèvres serrées, ses épaules relâchées. La colère, prisonnière, d'un chagrin qui l'enserre.

Il n'a jamais pu porter plainte contre elle. Il n'a réussi qu'à fuir. Fuir son étreinte dangereuse, ses morsures empoisonnées, les affaires dans lesquelles elle était mêlée.

Ce n'est que pour son fils qu'il parvient à se lever. S'opposer à elle et son monde empli de vipères. La Milice ? Il les a déjà approché, mais n'a jamais osé parler.  

L'alcool. Seul refuge, seul allié. Efface les souvenirs, le peu qu'il reste de sa dignité, apaise les douleurs, éteint les questions, absorbe sa réflexion. Son existence, noyée sous les injures et la boisson.

Seul, seul, jusqu'à il y a quelques années.

Cet enfant, non voulu, pas désiré, cet enfant qui n'est peut-être pas même de son sang, cet enfant qu'il a aimé. Aimé à s'en damner.

Tout sacrifier, pour le protéger.

Pour l'enlever d'elle, araignée aux pattes armées de crochets, plantés dans sa chair, il s'est arraché.