Bonjour la police !

Elle s’affaire, elle aussi, à ramasser ce qui lui tombe sous la main qui semblerait appartenir à l’un des nombreux marchands affectés par le chaos de la situation. Elle s’affaire, elle aussi, à s’excuser auprès de ceux qui ne semblent pas comprendre que la Justice ne s’arrête pour personne, même si, au fond, la « justice » aurait sûrement dû y repenser à deux fois avant de foncer. Et alors qu’elle rapiéçait bijoux brisés et autres petits objets fracassés, le regard se voile d’une certaine amertume, d’une résignation peu caractéristique de la part de la jeune femme.

Aube aurait normalement protesté un peu plus fort. Elle lui aurait dit, à Caspian, que ce n’était pas à lui de prendre le blâme pour ses actions à elle. C’est peut-être lui qui a demandé à ce qu’elle fonce, néanmoins, la décision était la sienne. C’est elle qui a décidé d’écouter et foncer sans réfléchir. C’est elle qui a fracassé les étals des commerçants qui se trouvaient juste un peu trop sur le chemin. C’est de sa faute à elle, puisque c’est elle qui a fait les dégâts. Mais elle sait aussi que Caspian, c’en est un têtu. Qu’il ne lâcherait pas le morceau, même si elle insistait encore et encore, et qu’il refuserait de la laisser prendre le blâme d’elle-même pour ce qui est arrivé aujourd’hui. Parfois, c’en était énervant. Mais elle avait appris à simplement le laisser faire puisque c’était plus ou moins inutile de tenter de le raisonner. Alors, l’anima zébrée se contente de pousser un soupir et d’aller poser ce qu’elle a dans les bras sur l’étalage le plus proche.

« Tu me laisseras pas gagner sur ce point, je le sais déjà. »

Elle le dit d’un ton légèrement amusé, les lèvres étirées en un demi-sourire. Elle aurait dû s’en douter, au fond, que le blond lui répondrait de la sorte. Les choses ont peut-être changé depuis qu’ils se sont séparés, puis retrouvés amicalement deux ans plus tôt, mais certaines resteront toujours les mêmes – à commencer par Caspian et son sens de l’honneur inébranlable.

Au bout de quelques minutes, un dernier effort révèle enfin le pavé de la rue marchande, qu’Aubépine observe longuement l’espace d’un instant. Si au départ, la majorité des gens qui l’occupaient avaient eu l’air assez hostiles envers eux, maintenant, les regards noirs étaient un peu moins intenses. Fragments de poteries ornées jonchaient le sol çà et là, mais la plupart des articles étalés avaient pu être récupérés. La jeune Milicienne se retourne ensuite vers son partenaire, qu’elle observe en posant les poings sur les hanches.

« T’as raison. Si on avait pris un autre chemin, il se serait rendu à Brise-Cœur avant qu’on puisse l’arrêter. »

Ça la peinait de l’admettre, mais briser quelques poteries et défoncer les étals des marchands n’avait été qu’un obstacle en travers de leur mission. Mission qui n’avait rien de bien exceptionnel, cela dit, puisqu’il ne s’agissait que de l’arrestation d’un voyou qu’on avait pris avec la main dans le sac. Enfin, c’était comme ça qu’elle voyait la chose, elle.

« On le force à marcher jusqu’au QG, ou on lui attache les pieds et les mains ensemble et j’le ramène sur mon dos ? »

Aube hausse un sourcil, fixe le Fennec d’un air quelque peu suspicieux, croise les bras sur sa poitrine.

« Personnellement, j’le forcerais à marcher tout le tour de l’île. Ça lui apprendra. Mais ça, c’est juste moi. »

Haussement d’épaules, sourire plus solaire qu’à l’habitude – rare occurrence depuis quelques années, maintenant –, attitude un peu plus décontractée maintenant que le stress du nettoyage et des conséquences graves se dissipe peu à peu. Au moins, une pointe d’humour n’a jamais fait de mal.