Caractère
Irascible ✦ auto-destructeur ✦ querelleur ✦ à la fois persuadé de sa supériorité et nourrissant une haine profonde envers lui-même ✦ impulsif ✦ éternel insatisfait ✦ égoïste ✦ difficile ✦ acerbe ✦ instable ✦ effronté ✦ périodiquement pris d'épisodes dépressifs sévères
Adroit ✦ déluré ✦ endurant ✦ passionné ✦ surprenant ✦ désinvolte ✦ spontané ✦ rusé ✦ esthète

Micheletto a toujours été un goût acquis: irascible petit con dans sa tumultueuse jeunesse, encouragé par les mauvaises fréquentations dont il s’entourait volontiers, ses sautes d’humeurs et ses tendances aux mauvais plans lui ont valu une réputation explosive. Il suscitait autant de mépris que de fascination: connu comme virtuose du pinceau, vaurien s’acoquinant aussi bien des femmes que des maris de ses clients, bourrin dont la délicatesse n’était réservée qu’à la minutie de ses toiles… Mais surtout comme un artiste à la muse volage laissant derrière lui tableaux inachevés et clients en colère.

Se payer une toile -ou pire encore, un portrait- du terrible Micheletto, c’était un pari risqué, ce qui ne faisait qu’ajouter à la valeur de ses rares oeuvres achevées. Alors on le supportait dans son cercle par orgueil, pour amuser la galerie et faire jaser, ou dans le simple espoir de voir sa commande terminée.

Si ses toiles demeurent appréciées, le personnage, lui, a fini par tomber en disgrâce. Il se trouve que même les aficionados de ce cocktail particulier ont fini par le trouver écoeurant: à force de tapage, polémique, abus de confiance et de patience, les invitations à égayer le salon ont fini par cesser pour de bon.
Il est devenu un cafard qui refuse de disparaître, jouant de ses connaissances restantes pour garder la tête hors de l’eau; il sait très bien lesquelles n’osent pas dire non, dans quel lit il sera bienvenu pour un soir, où il peut aller gratter au nom du bon vieux temps et ceux qu’il peut aisément intimider. C’est minable, bien sûr, mais peu de gens osent le lui dire en face; les rares téméraires qui le font apprennent vite pourquoi les autres craignent sa susceptibilité.

La vérité, c’est que lui-même n’en peut plus de sa compagnie, de ne pouvoir résister à l’impulsion perverse de détruire tout ce qui est bon et de repousser ceux qui ont entrevu ses faiblesses les rares fois où étreinte, alcool et dawamesk se sont alliés pour délier sa langue et faire tomber ses murs. Et s’il est transparent pour beaucoup que tant d’arrogance cache un mal-être profond, il est insupportable pour lui d’être vulnérable, ou pire: pris en pitié.

La compassion à son égard, plus encore que le dédain, est une chose qu’il a toujours eu en horreur. Il en est allergique, comme si elle risquait de mettre des mots sur ce qui tourbillonne au fond de lui, sur ces choses qui doivent rester abstraite à tout prix, exprimable uniquement à travers la peinture.

Mais quand la peur le saisit en se retrouvant devant le gesso vierge d’un canvas fraîchement tendu, il n’y a nulle part où les déverser. Alors il les noie, passant des journées entières ivre mort jusqu’à ce que sa muse reviennent.

L’art ne lui est jamais venu aisément; ça a toujours été autant synonyme de sang, sueur et frustration que d’expression libératrice. C’est sa pire amante, celle qui se délecte de le faire tourner en bourrique, l'obsédant au point de négliger ses besoins puis l’abandonnant sans un au revoir au petit matin. Elle le traite comme il traite les autres, le mâchant et le jetant à sa guise, ne laissant que chaos, tristesse et vide derrière elle.

Mais il l’attendra, toujours.
Car sans elle, il n’est que Micheletto, l’homme.
Et cette idée est bien plus agonisante que les supplices qu’elle lui fait subir.


Détails physiques
1m77 mais trapu ✦ son style de vie lui fait faire le yoyo entre sous-poids et poignée d’amour ✦ décemment musclé mais pas taillé, ses biceps sont là pour faire mal, pas frimer ✦ bouc moins fourni qu’il ne le voudrait, gardé court ✦ à vrai dire, la nature a été très aléatoire de ce côté: si une trainée de poil remonte le long de son ventre et qu'on ne le dirait pas imberbe en regardant ses bras et ses jambes, son torse, lui, est plus lisse que les fesses d'un bébé -un complexe stupide qu'il est bien sûr le seul à voir ✦ blanc de peau, il prend vite des couleurs au soleil ✦ cheveux noirs, épais et rarement coiffés qui mériterait un passage chez le coiffeur ✦ yeux bleus foncés perpétuellement cernés ✦ souffre d’une terrible resting bitch face, ses rares sourires sont toujours narquois ✦ ses phalanges sont subtilement constellées des séquelles de ses nombreuses rixes ✦ garde aussi le souvenir d’un coup de couteau au niveau de son abdomen ✦ son style vestimentaire ne peut être décrit que comme la rencontre d’une nymphe préraphaélite et d’un rayon pyjama, plus fastueux que ce que l'on imaginerait aller avec son tempérament

+++
Grand amateur de thé, contrairement à ce que l’on pourrait croire ✦ dit thé est presque toujours rehaussé d’une lampée de liqueur de prune ✦ les cocktails chaud sont à vrai dire ses préférés ✦ dans les bons jours, il sent un mélange de térébenthine, d’épices, d’encens et d’alcool ✦ dans les pires il vaut mieux ne pas s’approcher ✦ on pourrait dire que son palais est plutôt raffiné, mais c’est une bille en cuisine donc il mange toujours dehors ✦ oublie souvent de manger quand il peint (ou boit) ✦ il lui est déjà arrivé de confondre sa tasse et le solvant et de faire un petit trip au service des intoxications… Plus d’une fois ✦ n’a pas de lit, il dort à même le sol de son studio sur une pile de coussin tel un dragon sur son butin ✦ plusieurs de ces coussins ont été volés au cours de sa vie ✦ son excuse est qu’il a l’oeil pour les belles choses, ce qui se sent dans le fatras maximaliste de son studio ✦ a appris à lire le ciel nocturne avec sa mère et sait encore bien situer la plupart des constellations ✦  il en garde une fascination qui se ressent dans ses tableaux ✦ peint exclusivement à l’huile

It’s a guilt trip to know me

Tout le monde ne peut pas se vanter d’avoir été détesté avant même d’être né.

Bien sûr, il ne l’a pas su avant longtemps. Pour lui, sa famille, c’était maman, et maman seule. Pas de tantes ni de cousins, encore moins de grand-parent comme les autres enfants; de père ? Une vague notion, une demi-réponse à sa question lorsqu’il lui est apparu évident qu’il devrait en avoir un.

“Il a trouvé sa cause plus importante que nous.”
Des mots qui ne veulent rien dire pour un enfant, vite accepté.

Au fond, il n’avait pas vraiment besoin de quelqu’un d’autre que sa maman.

Maman est belle: même avec son uniforme de travail, elle ne laisse pas la chemise informe et les longues heures tardives se mettre en travers de son élégance.
Mais s’ils ne sont pas beaux, ces vêtements sont quand même pratiques, car il y a de grandes poches dans son tablier où il peut se glisser, petit raton à l’odeur camouflée par le détergent, roulé en boule et bercé par les cercles qu’elle dessine avec sa pâte sur les miroirs.
C’est leur petit secret car la garderie ne veut plus de lui, mais que son patron ne serait pas d’accord. Mais comme il est quand même curieux et qu’il s’ennuie, un soir, il ne peut s’empêcher d’aller explorer, et maman perd son travail.

Elle lui dit que ce n’est pas grave, qu’un accident ça arrive et que de toute manière, c’était mauvais pour ses mains.

My existence is a scandal

Micheletto perturbe la classe. Micheletto s’est encore battu. Micheletto est ingérable, ce n’est plus possible Madame.

Ce n'est pas son fils qui a un problème, c’est eux qui ne comprennent pas.
Ce sont juste des accidents.
Ce n’est pas de sa faute.
Il est plus sensible que les autres enfants, c’est tout.

Parce que Micheletto change beaucoup d’école, ils changent beaucoup de maison, et maman change beaucoup de travail. Elle lui a dit que ce n’est pas grave, car sa maison, c’est lui, et vice-versa.

Maman et Micheletto contre le monde.

Mais quand ils perdent leur location parce qu’il a dessiné sur les murs le jour de l’inspection, au bout du rouleau, les mots lui échappent.

“Pourquoi tu es comme ça, Micheletto.”

En voyant son petit visage rester interdit, le regret s’ensuit immédiatement.

Pour lui faire oublier, elle achète des craies et ils passent un après-midi incertain à recouvrir le square de gribouillis.

Chaos is all I know

Maman a trouvé une solution à tous leurs problèmes; c’est une tente de camping chinée pour presque rien, comme ça la maison peut juste bouger avec eux.
Il n’a jamais fait de camping, alors même au bout d’un mois, il ne se lasse pas de ces nuits complices à s’endormir lové contre son plumage après avoir passé bien trop de temps à contempler le ciel nocturne.

Il se trouve que les étoiles elles aussi ont un nom: elle les lui apprend au fur et à mesure qu’elles se dévoilent à eux, comme son père l’avait fait avec elle -mais elle ne s’attarde pas sur le sujet.
A la place, elle lui montre un grand W dans le ciel et lui dit.

“Et celle-ci, elle est nommée d’après toi !”

With all my bruised heart

Les douces nuits d’été deviennent de plus en plus longues et le froid marin s'immisce cruellement dans la vieille tente.
Lui, caché sous son aile, ne le sent qu’à travers ses frémissements.
Puis dans ses quintes de toux qui le réveillent la nuit.

Quand elle finit à l’hôpital, Micheletto rencontre enfin la première personne à l'avoir détesté.

C’est un grand homme au regard perçant qui ne baisse même pas la tête pour rencontrer le sien. Il le toise de toute sa hauteur et de tout son mépris. Sa mère fiévreuse ne dit pas un mot.
Il lui dit de le faire sortir,
alors elle se tourne vers lui.
La voix lourde de défaite.

“Va m’attendre dans le couloir, bébé.”

Ce qu’elle ne lui avait pas dit, c’est qu’il serait exilé de la chambre tant que quelqu’un serait en visite. Et il y avait toujours quelqu’un.
C’est comme ça qu’il découvre qu’avant Micheletto et maman contre le reste du monde, il y avait la famille.

Des tantes, des oncles,
des grands-parents,
pleins de gens qui chuchotent en le regardant au passage du couloir.

Alors il se met à dessiner dans la cour de l’hôpital, toute la journée. Les infirmières lui demandent pourquoi il n’est pas à l’école, où est sa maman, mais il reste muet comme une tombe, conscient qu’un changement terrible est en train de s’opérer.
La nuit tombée, quand il se faufile en douce dans sa chambre, puis sous ses draps, maman fait comme si tout était normal.

Il entend sa respiration sifflante à travers ses côtes pendant qu’elle caresse doucement ses cheveux.

Une des infirmières lui donne une boîte de craie grasse, du papier et un sourire quand la pluie vient effacer ses dessins.
Vu que maman ne voit pas le ciel nocturne depuis son lit, Micheletto se lance dans son œuvre la plus ambitieuse à ce jour, achevée au bout de deux jours de dessin intensifs.

A peine scotché au mur, il suffit d’une visite pour que son beau ciel nocturne finisse dans la corbeille.

This, that, the other, why even bother?

Micheletto déteste vivre chez sa tante.
Il déteste se faire tout petit, s’écraser.
Il déteste voir sa mère avec la tête basse, tout accepter.

Il se sent comme un volcan au bord de l’explosion, mais avant de sortir de l’hôpital, son beau sac à main posé sur le sol, elle l’a serré très fort contre elle et l’a mis en garde.

“Il n’y aura pas de deuxième chance cette fois.”

Alors il passe plus de temps à l’extérieur, fait ses crises de nerfs loin, loin de la maison, et serre les poings à s’en ouvrir les paumes quand vient l’heure de rentrer.

Un jour, il trouve la maison vide.
Et quand maman revient, elle lui dit qu’elle est mariée à un monsieur maintenant.

Maybe rage would lift me up

Quand il jure fidélité à une autre maison, personne ne cille.
En même temps, il n’a rien eu. Pas de fête. Pas de grande cérémonie. Juste sa mère qui a réussi à grande peine à être congédiée par son mari pour aller avec lui au temple.

Même elle, elle n’est pas en colère, elle a juste l’air triste, comme à chaque fois qu'elle le regarde.

“Suivre sa propre voie, c’est le plus important, tu sais.”

Mais en la voyant jouer avec la petite sœur qu’il n’a pas le droit de clamer comme telle, il comprend le sens de ces mots.
Caché, de là où il se tient, il l’entend rire pour la première fois depuis longtemps, plus heureuse qu’il ne l’a jamais vue avec lui.

Tell me I'm exceptional, I promise to exploit you

La vie de nomade était plus douce dans l’ignorance de l’enfance. Micheletto est incapable de garder un emploi bien longtemps, mais à force de traîner après s’être fait virer, il fait des rencontres intéressantes et intéressées.
Il trimballe son bric-à-brac, ses toiles et les tubes de peinture que sa mère lui achetait en douce avec son argent de poche. Il les vide à l’instant où il trouve un endroit où poser son chevalet.
Il y a une urgence à vomir toute la frustration accumulée sur la toile. C’est laid. C’est pur. Sans filtre, ni rien.

Il faut un peu de temps pour que son trait mature. Qu’il apprenne à digérer ses émotions.

En attendant, il fait beaucoup de bêtises.
Manque trop de fois de s’attirer des ennuis avec la milice.
(heureusement qu’un rat peut se faufiler partout)

Embrasse beaucoup de gens.
(souvent pour qu’on oublie qu’on voulait le jeter dehors)

Bois, fume, fait la fête à pas d’heure.
Baise sous le ciel nocturne,
n’ayant d’yeux que pour les étoiles.

Et quand il est seul, il rôde autour des galeries,
s’invite aux vernissages,
pique une flûte de mousseux et remplit ses poches de cacahuète salée, au cas où.

C’est en serpentant sa main encore maculée de peinture vers un verre qu’on lui demande un jour
Oh, vous peignez ?

I’ll be the star
You can be the horrified one

Lorsqu’il montre ses croûtes, le galeriste les jaugent telle quelle -c’est du moins tout ce qu’il retient, la moindre éloge tombant dans l’oreille d’un sourd au moment où il lui répond qu’il ne peut pas l’exposer car il n’expose que les artistes établis.

Il devrait tenter sa chance dans une plus petite galerie.

A la place, le jeune Micheletto, du haut de ses 19 ans, remporte le premier prix au concours local avec une toile toute particulière qui fait son effet,
il faut dire que le sujet, étendue de tout son long dans sa tenue d’Eve, sa peau éclatante aux reflets célestes brillant contre le bleu profond de son décor, ressemble à s’y méprendre à la femme du galeriste,
à certains détails près que seul lui et Micheletto connaissent.

Ce pont brûlé illumine le chemin loin de l’indifférence. Et si Micheletto voit son chevalet éclaté dans la rue, jeté de la fenêtre par son petit ami du moment avec le reste de ses affaires, il ne s’est jamais senti aussi vivant.

They are disgusted by my blood,
but they love to watch me bleed.

Pour la première fois de sa vie, Micheletto goûte à l’adulation.
Pas que le ramassis de sale gosse qu’il appelait ses amis, et qui comptait bon nombre de ses ennemis, ne l’appréciait pas à leur manière.
(on pourrait dire qu’ils l’aimaient avec tous ses défauts, eux)

Mais ça, c’était autre chose.

On veut voir Micheletto.
On veut visiter son atelier.
On veut qu’il soit présent.

Les vrais cercles artistiques de la maison des roses et de l’ombre s’ouvrent à lui,
mais très vite le naturel revient aux galops.

Les excès sont nombreux, les délais vite dépassés. Micheletto n’aime pas être pressé -ne peut tout simplement pas être pressé. Il explose. Une. Deux. Trois fois, faisant éclater des scandales spectaculaires qui très vite dépassent la réputation de son travail. Brise un cœur ou une amitié. S’isole. Fait le mort pendant quelque temps chez une vieille connaissance. Revient sur le devant de la scène avec une nouvelle exposition.

Rincez,
répétez.

Avec des excès toujours plus grand,
des délais toujours plus longs,
des scandales toujours plus ignominieux,
et moins en moins de relations à ruiner.

In those years, I did everything I could do
And I did it in the dark

tl;dr: