Cliquez sur les titres pour entendre de la musique !Stella’s Lullaby – The SpiritfarerAu creux des bras chaleureux
par un jour pluvieux
on accueille un poupon.
Un bébé tout juste né
une petite âme toute neuve
un petit être qui a crié
un petit être qui a pleuré
qui a annoncé son arrivée haut et fort.
Lorsqu’elle s’est enfin calmée
on l’a admirée
cette enfant tout juste née
et on lui a murmuré
« Qu’elle est belle, cette enfant »
la voix de Maman que la petite a reconnue
qui lui a fait ouvrir ses grands yeux rougeâtres
et observer le monde pour une première fois.
Et quand Papa l’a vue
il a immédiatement su
« Toi, tu t’appelleras
Cadenza. »
Childhood Dreams – SeraphineChoyée par Maman
éduquée comme le veut Papa.
Voilà comment débute la vie de Cadenza –
un peu comme toutes ces histoires de princesses
où les filles font ce qu’on leur dit
puis deviennent rebelles lorsqu’elles réalisent
qu’elles n’ont rien à perdre lorsqu’elles désobéissent aux ordres donnés.
Pas elle, cependant.
Pas Cadenza.
Non, Cadenza, elle s’épanouit –
elle voit ce que les autres n’ont pas vu.
Elle voit que Papa lui dit quoi faire
parce qu’il se soucie d’elle
parce qu’il la prépare à accomplir de grandes choses.
Alors elle écoute, elle obéit au doigt et à l’œil
et lorsque les entraînements se terminent enfin
elle se réfugie dans les bras de Maman
réconfortée par sa douceur au bout d’une longue journée.
C’est là que Morphée vient la chercher
l’emporte dans un sommeil profond.
Et Morphée l’entraîne dans un monde différent
à chaque nuit, un paysage tout nouveau
de nouveaux visages, de nouvelles histoires
mais parfois, il y a un rêve qui revient.
Elle se voit en héroïne, Cadenza –
une héroïne qui aide les autres
petits et grands
riches et pauvres
innocents et criminels.
Elle se voit en héroïne
parée d’un bel uniforme.
Et elle se dit :
« Ah, comme j’ai hâte de grandir.
Je deviendrai alors
ce que je veux être. »
Higher – Smash Into Pieces Les années passent
L’enfant grandit.
Ce furent les années où on a dansé le ballet
où on a commencé les cours d’auto-défense
où on a commencé à la préparer doucement à un futur tout tracé.
Elle jure fidélité à la Maison de la Lune et du Sang
parce que Papa en a décidé ainsi
et Cadenza
elle veut que Papa soit fier d’elle.
Maman
elle n’a rien à redire là-dessus
si ce n’est qu’elle est fière de sa fille, elle aussi
(mais si c’était à refaire
elle aurait choisi
un autre chemin pour elle).
Alors Cadenza suit docilement le chemin qu’on lui trace
sans faire d’histoires
sait que ça lui permettra d’atteindre son but.
À 14 ans, la première année d’apprentissage qui commence
s’écoule très vite
trop vitetout comme celles qui suivent.
Cadenza aux scores stellaires
Cadenza qui excelle dans toutes ses matières
Cadenza qui se donne corps et âme à ses études
déterminée à faire en sorte qu’on devienne fier d’elle
de ses accomplissements.
Mais plus le temps passe
et plus Papa la regarde avec ce regard sévère
ce regard
hautain
ce regard qui anéantit peu à peu ses espoirs
mais qui lui fait redoubler d’efforts.
Car elle veut qu’on puisse dire
qu’on est fier d’elle
qu’on est heureux de dire
qu’elle fait partie de la famille
pas comme ce « vaurien » dont Papa parle parfois
ce « vaurien » qui n’a pas de nom
ce « vaurien » dont la mention fait parfois grimacer Maman.
Alors Cadenza se donne corps et âme à ses études
à ses entraînements ;
elle donne tout ce qu’elle a
sans jamais demander quoi que ce soit en retour
sans jamais poser de questions.
C’est la même chose à la maison
on s’attend d’elle qu’elle fasse ce qu’on demande
sans jamais lui donner quoi que ce soit en retour
pas même quelques mots encourageants
pas même de félicitations
pour les scores et performances impeccables
outre peut-être une étreinte de Maman
un petit mot soufflé à l’oreille
« Bravo, ma grande fille »
qu’elle lui murmure
alors que Papa, lui
tourne le dos
soupire bruyamment
émet un simple
« Tu peux faire encore mieux, Cadenza »
de sa grosse voix grave
«
Vise encore plus haut –
toujours plus haut. »
Et elle réalise, la pauvre enfant
que son Papa ne sera jamais satisfait
qu’il ne la verra jamais comme plus qu’un être imparfait
une enfant qui doit prouver sa valeur
une œuvre en cours de perfectionnement.
Mais c’est un détail qu’elle refoule au plus profond de sa conscience
parce qu’elle aime ses parents
elle aime sa famille
et elle ne veut pas les voir autrement
qu’avec ces petites lunettes roses
qu’elle a portées toute sa vie.
Bad Blood – Bastille La famille
on les blaire ou on ne les tolère pas.
Ç’a toujours été comme ça
et ça le restera toujours.
Au fil des années
du temps qui passe et se meurt
les vieux secrets ensevelis sous la poussière refont surface
sont dévoilés au grand jour.
Cadenza, elle a confronté Maman, un jour
avec une vieille photo qu’elle a trouvée quelque part
dans un carton égaré qu’elle a pensé était à elle
une photo de Maman avec un petit garçon
un petit garçon qui lui ressemble
à Maman
à elle-même.
« C’est ton cousin, » qu’elle avait dit
et le ton n’avait laissé de place à d’autres questions
mais Cadenza a voulu en avoir le cœur net.
«
J’en ai assez, de tous ces secrets, » qu’elle a répondu. «
Toute ma vie, on m’a caché des choses, on m’a laissée dans le noir. Papa parle d’un ‘vaurien’ depuis que je suis gamine, et toi, tu grimaces quand il le mentionne. T’as grimacé quand je t’ai montré cette photo.
Alors dis-moi la vérité. »
Et la vérité, on lui a bien dite
à travers les dents serrées et la voix amère.
Ce garçon sur la photo, c’est son demi-frère.
Un demi-frère qui a fait honte à Maman
que Papa ne peut voir en peinture pour une raison qu’on n’a pas voulu lui dévoiler.
Dont le nom apparaît parfois dans la Gazette
accompagné d’un scandale quelconque dont on ne veut même pas connaître l’ampleur.
Qu’on lui ait parlé de ce demi-frère qui n’a jamais été dans le décor en était bien assez
selon Papa.
Il ne voulait plus qu’on en parle
qu’on ne mentionne ce « petit con » une fois de plus.
Il n’en parlerait plus jamais
et Maman avait intérêt à en faire de même.
Et quand bien même Cadenza aime sa famille
maintenant, elle ne voit plus ses parents du même œil.
Elle leur en veut de lui avoir caché l’existence de ce frangin toutes ces années
elle leur en veut de l’avoir laissée découvrir la chose ainsi
qu’elle a un demi-frère
peut-être quelqu’un avec qui elle aurait aimé grandir
qu’elle aurait aimé avoir dans sa vie.
Et toutes ces années perdues
à grandir sans avoir la moindre idée qu’il existe quelque part sur cette île
ça ne fait que nourrir cette boule d’anxiété grandissante
celle qui est apparue au creux de la poitrine depuis quelques temps
cette peur du temps qui passe
des regards remplis de jugements
des œillades désapprobatrices et déçues
hautaines.
Looking At Me – Sabrina Carpenter Les objectifs braqués sur elle
le flash des caméras illumine la pièce.
Cadenza, devant un fond blanc
modèle l’une des plus récentes collections de l’un des stylistes les plus réputés d’Haklyone.
Elle se maquille d’une façade parfaite
celle de la stoïque jeune femme qui a mieux à faire que d’être ici.
C’est ce qu’on lui a demandé, de toute manière.
C’est ce qu’elle est
au naturelelle qui a
toujours mieux à faire ailleurselle qui ne prend ces contrats que de temps en temps
que les jours où elle n’est pas en service.
C'est un peu sa manière de se faire de l'argent en plus
d'arrondir un peu plus ses fins de mois.
Parfois, elle voit sa tronche sur les affiches de certaines boutiques
tronche de petite soldate métamorphosée en mannequin
un visage qu’on reconnaît parfois dans la rue.
Ça la fait doucement sourire
d’un air un peu niais, mais surtout anxieux
car Cadenza n’a pas toujours l’impression de savoir comment réagir face à cela
face au fait que son nom est connu.
Mais elle sourit, pose pour une photo
remercie ceux qui l’ont reconnue pour leur soutien.
Quelque part, ça lui fait plaisir de savoir qu’on la voit
ça lui fait plaisir de savoir qu’on la regarde.
Best Excuse – Saint Chaos Nouveau jour, nouvelle excuse
Maman qui ne veut rien dire et Papa qui jure.
Aujourd’hui, Cadenza a décidé que les excuses
elle n’en veut plus
elle n’en donnera plus.
Aujourd’hui, Cadenza veut découvrir ce qu’elle n’a pas découvert
Cadenza veut se défaire de cette image de la petite fille parfaite
celle qui se tient dans les jupes de Maman
et qui obéit aux ordres de Papa.
L’image du petit soldat parfait,
cependant, demeure.
Aujourd’hui, Cadenza se défait de ses chaînes
une entrave à la fois.
Et le temps qui passe, qui se meurt
celui qui est gaspillé et qu’on ne retrouvera plus
ce temps-là, elle essaie de l’oublier malgré la peur
et elle essaie de
vivre.