Petit soldat de plomb pas encore tombé au combat, seulement perdu dans les méandres du temps, dérouté, déboussolé, coincé quelque part entre le passé et le présent. La vision constellée de lumières pailletées, entre deux clignements de yeux, c’est sa notion du temps qui s’égare. Parce que l’horloge ne fait plus tic, tac, tic, tic.. tac.. Parce qu’ici on mesure les minutes au compte-goutte, qu’elles s’écoulent le long d’un tuyau en plastique rattaché à son bras. Ploc. Ploc. Ploc.
Pensées éparpillées qu’il s’efforce à rassembler, ses phrases meurent néanmoins dans le fond de sa gorge, quittent faiblement ses lèvres dans un ramassis incompréhensible de marmonnement et de balbutiements. Ses paupières s’affaissent d’elles-mêmes, la lucidité s’arrache à lui un peu plus à chaque seconde qui passe, c’est une lutte constante pour ne pas baisser sa garde, pour ne pas laisser sa conscience glisser au loin.
Les doigts s’engoncent dans les plis des draps, la tête roule sur le côté dans une position inconfortable. Il n’est pas chez lui, pourtant ça ne ressemble pas à l’archange. Il n’y a pas de cris, pas de silhouettes affaissées à même le sol. Ce silence l’angoisse. Ne pas savoir, ne pas comprendre l’inquiète.
Il faut qu’il sorte d’ici, s’assurer que tout le monde va bien. C’est ce que font les miliciens, protéger autrui.
Tous ses fils qui pendent à ses bras. Il n’en a pas besoin. Le mieux serait de les arracher, ici et maintenant.
L’affreux bourdonnement des machines, le rythme cardiaque apaisé qu’il craint de voir s’affaisser. L’odeur pestilentiel du vieux carnage, de la bétadine sans âge ; remue les sens, les nez froncés devant les draps immaculées senteur de produit chimique. Les murs trop pâles, ça lui fout le cafard, imaginer les scènes, des gerbes de terreur dont il n’a pas su être témoin. Il ne s’est pas précipité ici, ce serait mentir. Il a fait passer Alexis avant tout le reste et quand finalement, les pleurs apaisés et le hérisson endormi il a enfin daigné décroché son téléphone et ses 18 appels en absence, il s’en ait mordu les doigts. Aurora Matkovic agitée au bout du fil, Caspian les trippes qui se tordent pour la deuxième fois de la journée, comme si ça n’en finissait jamais.
Installé sur une inconfortable chaise en plastique depuis déjà une dizaine de minute, les jointures serrées à s’en faire mal, les yeux scrutent avec attention la petite tête blonde endormie à ses côtés. Les cernes sous les yeux, les bandages blancs qui dépassent de l’encolure de la blouse d’hôpital. Les bip incessant et les fils qui partent dans tous les sens. Caspian, il ne sait pas gérer ce genre de chose, se demande un instant s’il préférerait étouffer son petit frère dans son sommeil ou lui promettre que tout ira bien. Nerveux, il a écouté le verdict des médecins. Rien de grave, juste du repos. Beaucoup de repos. Ca le rassure un peu, démêle les fils de la culpabilité (de ne jamais être présent au bon moment).
Les cils papillonnent et Caspian se penche, incertain. Ilya se réveille enfin.
« Hé Ilya. »
Les sourcils froncés d’inquiétude, il n’est pas sûr que sous les drogues administrées, l’autre parvienne à se focaliser assez. Une seconde de silence.
« T’as une sale tête. » Il ne sait pas quoi dire d’autre Caspian. C’est étrange d’observer le cobra dans un tel état de faiblesse, lui qui ne flanche jamais. C’est étrange, il n’a pas l’habitude d’avoir à s’inquiéter de ce genre de chose.
est-ce que est-ce que les murs de l’archange étaient aussi blancs? aussi triste (sans vie) aussi vides que son esprit blanc une toile dénuée de couleurs, (sans vie (un peu comme lui(?))) juste blanc
peut-être que c’est parce qu’il en faut plus pour peindre que de simples pensées désordonnées? ah ilya il il ne sait plus quoi (comment) penser et plus il cherche à comprendre plus il s’y perd.
sous ses doigts se referme son emprise sur les draps (blanc) à peine plus efficace que du papier pour chasser les frissons à en juger par leur épaisseur franchement décevante.
il y a quelqu’un qui parle. il l’entend sans l’écouter. et ce quelqu’un il se tient juste à côté. il le voit, ne le perçoit pas. les yeux dans le vague comme s’il voyait à travers la chair, comme s’il n’y voyait que du blanc.
« caspian…. »
soldat de plomb toujours alerte jamais la garde baissée voilà que la lucidité effleure à peine sa conscience, que sa perception des sens, du temps, se retrouve aujourd’hui abîmée amochée.
« caspian, il faut que tu les arraches. les pailles dans ma peau. »
d’un geste lent, la main vient taper la poitrine de son aîné et il attend, une supplication silencieuse dans ses yeux à demi-clos.
« y’a des gens, ils ont besoin d’aide. on doit aller les aider, t’attends quoi là…. ENLÈVE-LES. »
la voix pâteuse s’élève un instant à un cri, énervé, impatient (pas tout à fait lui) exige, réclame qu’on obéisse à ses ordres (un peu trop comme lui)
et il tape sur la poitrine une nouvelle fois, mollement bien que ce ne soit pas la volonté qui lui manque.
si la rancoeur n’a pas dévoré ses entrailles et qu’il y a encore un coeur qui bat là-dessous, alors il, son frère, l’aidera.
Les murs blancs oppressants, le bip incessant des machines, ça lui fou un peu la trouille à Caspian, de ce dire qu'il y a des gens ici qui ne se réveilleront peut-être pas. Le visage de son frère trop pâle sur l'oreiller couleur médicament. Combien de temps est-ce qu'il attend ? Une minute, dix ? Ilya s'agite, l'aîné souffle un peu de soulagement. Il se dit, qu'il va pouvoir l'engueuler, le voir rouspéter, subir les moqueries. Comme d'habitude parce que rien ne change, et encore moins Ilya Matkovic. Ca le rassure d'être reconnu, d'entendre son prénom marmonné d'une voix pâteuse. Ca le ferait presque rire si tout ça n'était pas aussi dramatique, s'il n'avait pas déjà vu la peine dans le regard d'Alexis.
"Ilya tu-" Il s'arrête, hausse un sourcil à la main qui s'abat faiblement contre son torse, comme une vilaine piqûre de moustique. Il le laisse faire, un peu curieux des piques acerbes qu'il imagine déjà pleuvoir sur lui. Pourtant, les sourcils finissent par se froncer sous l'interrogation. La panique dans le regard de son frère, les mots qui veulent tout dire. Ilya, il se croit encore là-bas. Dans un sourire apaisant (mêlé d'une grimace ennuyée), le fennec finit par attraper la main, la serrer entre la sienne, l'éloigner du torse que le plus jeune a l'air de vouloir malmener à tout prix. "Calme toi Ilya." Un peu autoritaire, il a l'habitude des soldats. Et l'autre aussi.
"On ne va rien arracher du tout, c'est probablement une sale drogue mais ça t'empêche juste d'avoir mal." Il se penche, le regarde dans les yeux pour bien le lui faire comprendre. "C'est fini, t'es plus à l'Archange Ilya, tout le monde a été évacué. On est à la clinique Bartholomé. Tu t'es pris une sacré raclée..." Il voudrait que ça sonne comme une blague ou une réplique acerbe. Se moquer un peu comme ils l'ont toujours fait. Ça sonne pourtant terriblement mal entre ses lèvres, car Caspian, il ne peut pas s'empêcher de s'inquiéter ; même des pires calamités.
le bras faiblement tendu qu’il agite lentement sous ses yeux tape, frappe, poing dénué de force tout ça pour lui faire comprendre qu’il serait bien temps de les arracher qu’il perd patience qu’ils perdent du temps à attendre on ne sait quoi.
la main dans celle de son aîné, le cadet a soudain l’air bien embêté. comme si pendant un instant il était de nouveau lui-même.
« tu comprends rien. tu comprends jamais rien. »
non, caspian il ne comprend pas. comment peut-on être calme après les cris les pleurs les explosions et la peur?
« …oh. »
l’expression sévère se métamorphose en une moue curieuse, yeux rivés sur les tubes de plastique, lentement le cobra hoche la tête. de la drogue, ça fait du sens, c’est une réponse acceptable. ça explique certaines choses et d’autres non.
mais le regard redevient de glace et la mauvaise humeur suit le pas. le cobra s’arrache de la poigne de l’autre, sans prévenir le corps se relève dans une position assise dans un élan de colère ravivée et même si le mouvement brusque force une grimace hors de lui, la blessure la plus préoccupante en cet instant, c’est celle de son égo piétiné.
« N’IMPORTE QUOI! Je me suis PAS pris une raclée! C’est p’t’être TOI qui a pris de la drogue pour dire une connerie pareille!! »
Le cils papillonnent un peu sous la morphine administrée, Ilya dans un état étrange probablement, mais de quoi rassurer Caspian. S'il raconte des idioties, c'est qu'il n'est pas si mal en point que ça, le frangin. Caspian a le soupire inquiet au bout des lèvres, la mine un peu amère, un peu déçue de voir que rien ne change ; pas même sous les bombes, pas même aux portes de la mort. Ilya fidèle à lui-même.
Eclat de compréhension dans le regard de l'autre, bien vite enfouis sous la colère. Non Caspian n'y comprend rien, non Caspian ne comprend jamais rien. Oui Caspian aurait dû être là, au moins pour Alexis, de quoi rouvrir la plaie, raviver la blessure douloureusement pansée alors qu'elle lui disait de ne pas s'inquiéter. La main rejetée, le blond finit par se reculer en soupirant, tirer une chaise près du lit pour venir s'y asseoir. L'humeur soudain maussade.
"Moi aussi ça me fait plaisir de te voir Ilya." Le sourire qui n'en est pas vraiment un. Plus une grimace, un carnage. Fatigué, il se passe une main dans les mèches blondes, s'enfonce sur sa chaise pour mettre un peu de distance. "Maman est passée tout à l'heure mais elle a dû rentrer, profites-en pour te défouler sur moi si ça t'amuses." Faussement amusé. Et papa, il n'en parle pas, il ne sait pas où il est. Ils ne se sont pas parlés, peut-être ne le feront-ils pas. Jamais. Aurora Matkovic a passé un moment ici avant qu'on ne la force à rentrer. Elle s'est inquiétée c'est vrai, mais Caspian n'a aucune envie de le lui révéler pour l'instant ; brin de méchanceté.
Il hésite soudain, porte son regard sur la grande fenêtre, le rideau blanc, la grande chambre dans laquelle échoue sans aucun doute les petits privilégiés. Hazgar a dû jouer avec ses relations pour trouver une chambre privée. "J'ai parlé à Alexis, elle m'a tout raconté." Un instant, il fronce les sourcils, se demande si son frère a bien compris que c'est sa colocataire, sa meilleure amie qu'il a probablement protégée au péril de sa vie. Peut-être qu'il n'en sais rien après tout, qu'il ne reconnaît plus personne à part lui-même. Caspian s'en fiche finalement, il hausse les épaules. Voudrait dire merci, pour Alexis. Pour Alysse aussi. Mais ça ne sort pas, reste bloqué en travers de la gorge. De quoi lui rappeler que lui, n'était pas là pour les aider.
Il finit par reprendre ses esprits, planter un regard dur sur son petit frère. "Les médecins m'ont dit que tu resterais là un moment." C'est peut-être mieux comme ça.
non, lui et caspian ça ne changera jamais les piques qui fusent de tous bords tous côtés n’ont jamais laissé place aux embrassades, à la joie d’avoir un frère c’est coulé dans le béton, l’issue de ce lien fraternel qui jamais ne cessera de s’effriter et la rancune elle continuera de s’infiltrer dans les fissures d’une relation figée depuis l’enfance. parce que voilà c’est comme ça, un point c’est tout.
alors ilya ne se fait pas d’illusion quand l’autre grimace. les sourires sincères les rires partagés sont aussi inexistants que leur complicité. dans ses yeux brillent des éclats de suspicion parce que oui, pourquoi pourquoi caspian serait-il heureux de le voir aujourd’hui plus qu’un autre jour? parce que dans le malheur on se rend enfin compte de la chance qu’on a, qu’il faut enterrer la hache de guerre, rattraper le temps perdu à se détester tout ça avant qu’il ne soit trop tard? ce sont des conneries. des foutues foutaises.
« …maman est venue…? »
caspian il dit qu’il peut se défouler sur lui si ça l’enchante mais ilya est déjà passé à autre chose à la mention de maman et alors les sourcils froncés se défroissent, les traits s’adoucissent il a toujours été plus proche de papa que de maman, ilya mais ça ne l’empêche pas d’avoir un point faible pour elle, maman, douloureusement douce, la voix semblable à un murmure. maman, misérable. ilya, il n’a pas assez de place dans son coeur pour y laisser entrer la pitié, mais pour cette femme qui l’a mis au monde, il ne peut s’en empêcher d’en avoir un tout petit peu.
le regard tourné vers la porte il attend elle a dû rentrer qu’il dit, caspian mais peut-être qu’elle reviendra s’il est patient suffisamment longtemps.
« alexis? »
alexis qui? ah oui. alexis (?)
« la petite brunette? »
c’est flou, dans ses souvenirs mais il se rappelle avoir entendu quelqu’un (terra? alysse?) avoir prononcé ce nom dans un lieu sombre et fait de poussière, oui, alexis. caspian ne l’a-t’il pas mentionné une fois, il y a longtemps? quand il est parti peut-être? ou bien avant ou bien après.
ah oui, ça lui revient maintenant. alexis c’est la petite amie de caspian. seule cette certitude demeure, ne laissant aucune place au doute dans son esprit.
« hmm… »
les lippes serrés, c’est qu’il est bien embêté d’un coup, en plein conflit intérieur, regarde caspian l’air d’hésiter. bouche ouverte bouche fermée ouverte fermée comme s’il n’osait pas se lancer, lui dire ce qui lui pèse soudainement sur la conscience.
« caspian… ta copine te trompe avec godzilla. »
pour une fois, ilya il a un peu de compassion pour son frère pour son coeur qui doit se briser en milles morceaux à l’heure qu’il est. personne ne mérite ça pas même caspian. il lui doit la vérité, au moins.
« si ça peut te faire sentir mieux, t’es sûrement un meilleur parti que cette pétasse. c’est pas grave, tu trouveras mieux. »
cobra hoche la tête d’un air solennel, les jérémiades d’enfant mises de côtés au profit d’un sujet plus sérieux. vraiment, quelle personne horrible, cette alexis pour tromper son frère avec une personne comme alysse alexis doit vraiment être désespérée, c’est triste.
le serpent balance ses draps hors de son chemin, déterminé à montrer à caspian que non, il ne restera pas ici une seconde de plus et encore moins quelques jours supplémentaires. mais le corps se fige à la vue d’une attèle à sa jambe, le souvenir flou d’une poutre tombée sur lui flotte à la surface de sa mémoire et voilà qu’ilya, perturbé, ne dit plus rien. qu’il enrage en silence.
et et caspian engoncé dans son fauteuil qui ne fait rien pour l’aider à sortir, s’évader pourquoi est-ce qu’il est venu? oui, c’est vrai, pourquoi est-ce qu’il s’y intéresse, à son sort? pourquoi est-ce qu’il est là? pour se moquer? rire de son incompétence? lui rappeler qu’il a échoué à quelque part pour se retrouver dans un tel état?
« pourquoi t’es là? »
ilya, le visage de nouveau crispé ilya, d’ordinaire si maîtrisé, ses efforts resteront vains tant que les médicaments continueront de couler dans ses veines, tant qu’il n’aura pas récupéré toute sa tête, le contrôle de lui-même, quand est-ce qu’il cessera enfin d’osciller entre la colère et instant de lucidité?
« t’es même pas foutu d’apporter des fleurs ou une carte de bon rétablissement en plus… j’espère que t’aurais fait mieux si ça aurait été mes funérailles…. »
parce qu’il aurait pu mourir ce jour-là, n’est-ce pas?
Quand on parle de maman, les yeux s'illuminent, le visage tournée vers la port ; on guette son arrivée et Caspian mime le geste comme si lui aussi s'attendait à voir la tête blonde d'Aurora Matkovic passer l'entrebaillement, le sourire paisible aux lèvres. Il le sait, elle et Ilya n'ont jamais été très proches, ça a toujours était papa et Ilya, maman et Caspian. La jalousie, il l'a depuis longtemps jeté dans l'oublie, certain que les exigences paternelles il ne les remplira jamais vraiment. Alors il hoche simplement la tête, murmure "Elle reviendra." Un peu pour lui, un peu pour son frère.
Alexis oui, toute attention reportée sur le plus jeune dans un froncement de sourcil inquiet. Qu'est ce qu'il y a encore ? Ilya n'a pas l'habitude d'hésiter, Ilya n'est pas du genre à le ménager. Alors quoi ?
La suite, il ne la comprend pas. Sa copine ? Godzilla ? Le fennec reste interdit quelques secondes en clignant des yeux, tentant de comprendre la signification de tout ça mais au final, rien ne fait sens. Ilya ne peut pas parler d'Aadhya, c'est impossible, pourtant le milicien devient un peu plus blanc en y pensant, figé. Mais non, il parle d'Alexis n'est-ce pas ? Et qui est censé être Godzilla, Alysse ? Il finit par hocher distraitement la tête quand soudain, il comprend, jette un œil à la perfusion et la poche de morphine. Ilya n'a plus toute sa tête, Caspian souffle de soulagement.
"Ah oui ? C'est pas grave Ilya, ça ira mieux demain." Avec tout ça, le frangin a totalement les idées embrouillées, le fennec lui lance un petit regard peiné. Il ne sait même pas ce qu'il baragouine avec toute cette drogue. "Mais je suis content de savoir que tu me considères comme un bon parti." Il ne prend pas le loisir de le reprendre sur les mots. C'est vrai parfois Alysse est une sacrée connasse. Machinalement, le fennec vient fourrager dans ses blondes en rougissant un peu, se demandant si Aadhya penserait la même chose : un bon parti.
Pourtant c'est le regard dur qui revient, les besoins d'explication, la grimace de douleur sur les traits du plus jeune. Pourquoi pourquoi pourquoi. Caspian devrait-il avoir une raison d'être là, de s'inquiéter, d'hésiter ? Il détourne le regard en soupirant, bien calé contre le dossier. "Pourquoi est-ce qu'il me faudrait une raison, t'es mon frère Ilya, c'est tout. Rien de plus rien de moins." Ça l'ennuie de devoir s'expliquer, il n'est pas sûr que le cobra comprenne. Peut-être que lui ne le considère pas comme un frère, ça ne l'étonnerait qu'à moitié. Il a toujours été dans sa bulle, n'a jamais voulu de l'aîné dans sa vie. Ça ne changera probablement pas aujourd'hui.
Il finit par le regarder à nouveau, sourcil haussé. Finalement, un léger sourire amusé vient éclairer la mine ennuyée. "C'est ça que tu voulais, des fleurs et une jolie carte ? Un bisou et des câlins ? Je peux me rattraper si tu veux, si j'avais su que tu le prendrais comme ça..." Il se moque, mais ça fait du bien. Ilya n'est pas aux portes de la mort, ça le rassure plus qu'il ne l'aurait imaginé.
la porte de la chambre d'hôpital s’ouvre et grince en un bruit peu rassurant. ça annonce sa présence et toutes les têtes se tournent vers l'home en costume qui vient d'apparaître. tout à coup, dans la pièce blanche habitée par deux têtes blondes, la pression se fait ressentir.
“c’est bien bruyant, pour une convalescence.”
sera les premiers mots du père. hazgar matkovic est enfin arrivé pour rendre visite à son plus jeune fils. c’est la première fois qu’il pénètre la clinique depuis l'incident, et s’il était évidemment inquiet comme n’importe quel parent, il n’en montre rien. le regard est toujours aussi dur, toujours aussi froid, et presque un peu supérieur, comme pour rappeler sans cesse qui fait la loi.
“ah, tu es là toi.”
le regard glisse vers caspian au chevet d’ilya. il lui décroche un regard et cinq mots, mais pas plus. la rancoeur et la frustration des décisions passées empêche une discussion censée. si caspian est là, alors pourquoi est-ce qu’il ne rentre pas ? hazgar ne comprends pas, hazgar ne veut pas comprendre, persuadé que ce n’est qu’une phase et que son aîné finira par entendre raison. parce qu’il en est sûr, hazgar, caspian sera le premier à céder. alors le lion se contentera de ces maigres paroles envers son premier né.
“ta mère m’a dit que tes jours n’étaient pas en danger. comment tu t’es retrouvé dans cet état ?”
ça sonne presque comme un sermon: pourquoi ilya matkovic, la pupille de la famille, se retrouve alitée à l’hôpital ? un soldat, son soldat, vaut mieux que ça. le nom des matkovic rime avec triomphe, jamais avec défaite. pourtant hazgar s’inquiète. aussi sévère soit-il, hazgar n’a que deux fils. et personne ne souhaite la mort de sa progéniture, pas même l’ancien maître de la maison dorée. c’est sa manière à lui de demander ce qu’il s’est passé.
lentement les yeux se referment dans une moue exaspérée et un long soupir s’extirpe d’entre ses lèvres caspian n’a rien compris de ce qu’il a dit mais pourquoi en serait-il autrement?
ilya il a même pas dit que caspian c’était un bon parti d’abord il a juste dit qu’il était mieux qu’alysse or faire mieux qu’alysse, c’est facile. mais si ça peut faire plaisir à un simplet comme caspian alors autant ne rien dire, le laisser croire ce qu’il veut histoire d’acheter la paix le temps d’un silence ou deux.
le cobra dévisage son aîné quand il dit t’es mon frère c’est normal (de vouloir accompagner son frère jusqu’à la mort ou presque (?))
« t’es troooop bizarre caspian. genre.. tu te rappelles que t’as une famille dans les pires moments… »
ilya sait plus trop ce qu’il dit c’est la fatigue (la morphine) qui parle le filtre, lui, a sauté parce que ilya jamais il oserait lui reprocher son départ non caspian caspian il fait ce qu’il veut ilya il s’en fout de caspian. il peut même aller jouer dans la fosse ou près des falaises s’il veut … même si ce serait mieux qu’il ne le fasse pas peut-être.
les yeux sont grand ouverts soudainement alerte à la mention des bisous des câlins l’horreur ravage ses traits et le cobra siffle un peu de cette manie dont il ne s’est jamais débarrassé quand il est agacé.
« si jamais tu me fais un bisou alors moi je veux une piñata de fennec… on pourrait faire une fête… y’aurait quoi d’autre? des ballons? une banderole? elle dirait quoi… bravo champion c’est pas aujourd’hui que tu vas crever? »
le cadet glousse incertain de savoir si sa mort hypothétiquement parlant est vraiment drôle ou si c’est la drogue qui rit à sa place.
et quand la grande silhouette d’hazgar pénètre dans la salle que sa voix gronde qu’elle marque un silence vient remplacer les rires en un instant seulement ilya le fixe pendant de longues secondes, son aîné soudainement oublié, volatilisé de sa mémoire
« salut… »
c’est qu’il a l’air sérieux et que le silence, la tension aujourd’hui ilya ne sait pas pourquoi mais ça le fait rire plus que ça ne le devrait.
« ah mais ça pour une SURPRISE. quelle belle réunion de famille, vous êtes pas d’accord? hein, caspian? t’es pas d’accord?! ça te fait pas PLAISIR? »
le regard est presque cruel, ilya a toujours été un peu spécial, lui et ses blagues étranges. pas étonnant qu’il n’y ait qu’ephraïm qui soit véritablement capable de le supporter. ilya n’a jamais su comment plaisanter comment aimer correctement.
« et bah c’est simple. ça a fait boum. »
le serpent hausse les épaules, comme si c’était amplement suffisant pour qu’on le comprenne. le geste lui arrache une grimace, malgré la morphine, il semblerait que son épaule lui fasse toujours mal. c’est qu’il a un peu de mal à se souvenir, ilya. un peu de mal à démêler le vrai du faux