Maxine tape du pied, aimerait piailler ; s’envoler. Elle n’aime pas les temples, elle n’aime pas cette ambiance morose, elle n’aime pas grand-chose et ça lui va ; tout lui va tant que la victoire ne lui remplit pas les mains. Bientôt, bientôt.
Non non la pie ne pointera pas son bec à l’intérieur,
Plutôt crever de froid.
Non non elle attendra dehors bien impatiemment à regarder les autres passer, sourire et s’extasier. Les regarder méchamment car au fond c’est ce qu’elle aimerait être, méchante. Horrible, cruelle. Maxine ne sait pas bien s’y prendre alors pour faire encore un peu semblant elle crache dans la neige à côté d’un gamin qui passe un peu trop près.
Voilà il l’a bien cherché (à aujourd’hui sourire plus que Maxine) mais déjà elle s’en désintéresse car son regard est happé par un éclat de sang, un éclat rubis qui lui brûle les pupilles. C’est le sien elle le sait, le sien et cette Yolène (qu’elle aime bien au fond) n’aura qu’à pleurer quand elle le lui aura dérobé.

Mais la prêtresse vient à sa rencontre, sourit, et puis Maxine oublie un peu, Maxine se frotte la poitrine parce que la culpabilité lui ronge un peu le cœur (est-ce qu’elle en a encore un ?). L’autre accrochée à son bâton comme si c’était son âme, son amante, sa raison de vivre.
Bon,
elle le volera un autre jour.
Demain peut-être, ou le mois prochain.
Haussement d’épaule pour elle-même et elle sourit un peu à son tour.

« Salut Yolène. J’ai des questions ouai. Est-ce qu’on t’oblige à porter ces horribles robes ? Est-ce qu’il fait toujours aussi froid dans ce bled paumé ? Est-ce que tes amies les âmes sii puissantes peuvent m’aider à devenir riche ? »

Elle le fixe, un peu sérieuse. Et puis rigole toute seule. Oh ce n’est donc pas ça prier ? Demander une robe pour l’hiver, une couronne pour le printemps, un trône pour l’été et une armée pour l’automne ? Ah elles savent toutes deux quelles questions la pie voudrait vraiment poser, celles qui grouillent comme des fourmis sous son crâne, lui murmure bientôt, bientôt à longueur de journée.

« Marche avec moi, j’ai les pieds tout gelés. »

Emmitouflée dans un gros manteau noir tout rapiécé et une vieille écharpe volée à un clochard (ça ne lui manquera peut-être pas, il avait l’air mort), Maxine tremble de la tête au pied.

Elle l’aime bien Yolène oui, c’est bien ça le problème. Personne ne lui a dit, qu’être cruelle était si compliqué.

Maxine se pense capable de tout Maxine se pense capable du pire. Elle pourrait les dévorer ; petits rongeurs dans son petit bec, faire couleur le sang et se baigner dedans. Elle aimerait bien Maxine, être le monstre de tous les cauchemars, démon sous le lit ; un peu comme le sien qu’elle nourrit de rancœur et d’amertume, de larmes toutes salées la nuit tombée. Maxine aimerait bien savoir tenir un couteau, une épée, une hache dans ses petites mains, les brandir vaillamment et trancher comme du beurre.
Comme dans les films, comme au quartier Brise-cœur qu’elle regarde d’un œil admiratif.
Mais Maxine se sait pas tenir une épée, ne sait pas hurler de chants de guerre ou faire une pirouette spectaculaire.
C’est a peine si elle coupe une pomme convenablement Maxine, à peine si elle ne crie pas à la moindre petite coupure, se plaint quand la charge est trop lourde.
Tout est petit chez Maxine ; son âme, sa taille, son nez, sa poitrine. Envie un instant Yolène, elle a un peu mal au cou à force de devoir lever la tête pour croiser les yeux pleins de puretés pleins de gentillesses (beurk).
Tout est petit mais pas sa haine.
Pas sa détermination.
Pas sa culpabilité.

Yolène Yolène Yolène comme une douce mélodie, comment lui dire d’arrêter de chanter ? De se séparer d’un morceau de son âme pour la lui offrir car Maxine Maxine Maxine tout égoïste, chanson décousue, veut un rubis en couronne et la peaux des autres pour s’en faire un trône. Est-ce possible d’être aussi pure sans rien cacher derrière ?
Si on dépeçait Yolène, que trouverait-on la dessus.
La pie l’imagine un instant sans la peau mais ce n’est pas très beau, Maxine a toujours trop d’imagination et la voilà qui fronce le nez ;
Face aux gentilles paroles car la prêtresse est toujours gentille. Toujours toujours toujours et ça la fait chier. Ce n’est pas normal c’est impardonnable.
Les belles et gentilles personnes n’ont pas de beaux bâtons aux arabesques d’or, pas de fidèles qui s’agenouillent sur leur passage. Pas de jolis couettes, pas de voix aussi douce.
Les gentilles personnes finissent par se faire bouffer une par une, crèvent en tendant la main et se rassurent en se disant que ça ira mieux demain.
Maxine n’aime pas les gentilles personnes. Maxine espère ne pas trop l’être elle aussi.

Elle sourit un peu mais c’est plus une grimace. Un peu vexée, lève une manche pour s’observer.

« Il n’est pas vieux. Juste un peu moisi. »

Voilà c’est dit Maxine Dupuy porte des vêtements pourris.
Instinctivement les yeux se posent sur le spectre (son spectre et y restent à jamais, répond un peu sans réfléchir.

« Alors mes vœux à moi son égoïstes mais ceux des autres c’est bon ? » Petit reniflement dédaigneux. « Je ne partage pas non, mais le miséreux ne partagera pas non plus avec moi. J’ai un travail tu sais. Un travail génial.»

Elle le sait tout simplement parce que depuis quelques années, c’est elle la miséreuse. Mais ça, elle ne le crie pas sur tout les toit, a un peu honte de vivre dans un appartement d’une pièce aussi moisi que son manteau, un peu honte de ne pas avoir de belles robes à mettre, un peu honte de devoir traverser toute l’île pour aller bosser dans une horrible usine tout ça parce qu’elle a été trop bête pour continuer ses études (s’accrocher) après la mort de ses parents.
Mais elle peut se rassurer, être orpheline est une parfaite excuse.

Hausse un sourcil en observant Yolène. Oui oui les capsules de bouteilles, elle a compris.

« Tu sais le principe d’une blague c’est de ne pas avoir à l’expliquer après. »

Yolène n’était vraiment pas très douée.
Mais elle ne lui dira certainement pas qu’effectivement, elle aime bien chaparder les objets qui brillent, qu’elle les entasse sous son matelas et que parfois la nuit quand elle n’arrive pas à dormir, elle les regarde et sourit. Se contente d’hausser les épaules, personne ne lui volera ses trésors, pas même Yolène (qui sait ce qu’elle pourrait faire d’une telle information).
Elle s’arrête soudain, plante ses yeux verts dans les prunelles de l’autre.

« J’ai une idée ! Tu me file ton petit bâton et toi tu prends la gourmette (si gourmette il y a). »

Grand sourire, oh Maxine adore les idées. Mais pourquoi ne pas aller fureter la bas oui, ce n’est pas une si mauvaise idée.

Maxine se demande ce qu’il faudrait de plus, ce qu’il faudrait de moins pour énerver la prêtresse, la faire brûler comme en enfer, les yeux rouges et la rage en bouche ; à prononcer les vilains mots  et rouvrir les blessures oui Maxine voudrait voir la Yolène cerbère, la Yolène sans artifices. Sans rien d’autre que la peau sur ses os et l’aigreur à son cœur. Ca doit être terrible de sourire sourire sourire sans jamais savoir s’arrêter, la pie la plaint un peu, lui donnerait volontiers le croche-pieds pour l’éclipser. Ah mais le rongeur se tend un peu et l’oiseau jubile car c’est comme ça qu’on vit, comme ça qu’on mord la vie à pleine dents jusqu’à en mettre de partout et adieu ceux qui voudront essuyer les lèvres sur ces visages avides. Peut-être Yolène est-elle plus qu’une prêtresse toute vide qui dit oui oui oui prosternez-vous, aimez-moi, aimez-vous. Peut-être qu’elle dira alors non non non ne ployez pas, levez-vous, envolez-vous.
Maxine elle s’en fout,
elle vole déjà.
Elle battit son propre enfer et s’en fait reine, loin des pierres froides d’un temple que les cœurs ne réchauffent même plus.

Maxine ne doit rien donner Maxine doit tout garder pour elle bien, elle prend l’autre au mot. Gardera même ses propres paroles bien enfouies dans sa gorge. La prend-elle pour une démunie ? Une sans argent incapable d’offrir un pièce ou deux ? Maxine se crispe aussi et les voilà toutes deux froides comme le temple froides comme l’hiver. Froide comme la pierre rouge sang engloutie par le spectre que la pie oublie parfois en se perdant dans les yeux de l’autre.
S’en souvient une fois la nuit tombée, les cauchemars entamés.
Alors elle insulte, elle crache Maxine. Jure d’être le monstre que l’on voudrait voir, le monstre que l’on voudrait détester ; celui des ses tableaux imaginaires qui prend forme le soir sous son lit.
Oh Maxine, Maxine a réveillé un autre monstre peut-être ? Un peu surprise de voir la petite prêtresse répondre, un peu surprise de voir sortir de sa jolie bouche autre chose que des mots tout beau des mots tout propre.

Maxine voudrait sourire, rire, se réjouir. Enfin enfin enfin ce n’est pas trop tôt. Se contente pourtant de garder une mine impassible, de rentrer ses mains dans ses poches avant de les voir finir congelées.
Petite étincelle au fond des yeux verts.
Ça,
Ça, c’est encore mieux qu’une pierre toute rouge.
Ça, c’est éclatant comme une étoile, scintillant comme un morceau d’or.
Ça, c’est la revanche des vivants et les affreux mots qui percent les cœurs.
Maxine la préfère comme ça, Yolène.

« Je n’ai pas besoin de protection. Les démons ça se dompte, ça s’apprivoise. Il faut les choyer comme les enfants et les nourrir comme les animaux. »

Et quand ils vous mangent dans la main, quand ils grognent et baissent la tête alors c’est gagné et c’est comme une armée de ténèbres dans les cœurs fous, dans les cœurs chaque jour un peu plus morts, un peu plus terrifiants sans jamais être à nouveau terrifiés.
Car comme on dit,
il faut un monstre pour tuer un monstre. Un cauchemar pour en éclipser un autre.
Petit sourire amusé sur les larges canines qu’elle n’a pas. Qu’elle la toise oui, qu’elle observe donc la pie de haut en bas car elle n’est guère plus que ce que l’on voit. Juste une gamine paumée au millier de cauchemars entretenus,  juste un oisillon tombé trop tôt du nid, lancé en l’air quand elle ne savait pas encore voler. Alors elle a dû ramper.

Petite grimace vexée aïe ça fait mal. Maxine est inculte Maxine est idiote.
Bon, c’est vrai qu’elle n’a pas fait d’étude.
C’est vrai que le monde ne se prosterne pas à ses pieds.
Et l’autre s’en va comme on abandonne un enfant, Maxine fronce les sourcils et se retourne dans un geste brusque, lui attrape fermement le poignet.

« Je n’ai pas besoin de tout savoir moi, je n’ai pas besoin de pouvoir compter les étoiles dans le ciel ou de danser comme une marionnette devant tous ces fidèles. N’importe qui peut lever un bâton et le fracasser sur un crâne tu sais. N’importe qui peut l’appuyer sur ta carotide et attendre ton dernier souffle. Un bâton ce n’est parfois rien de plus qu’un bâton. » Petit air sincère, sérieux. Peut-être le premier depuis le début de la discussion. « Tu t’appuis trop dessus et bientôt tu ne sauras même plus marcher sans. »

C’est triste et c’est la vérité. Que fera-t-elle Yolène si le spectre devait brûler dans un accident, couler au fond de l’océan ? Que serait-elle alors, prêtresse sans sa baguette magique, prêtresse démunie alors qu’au fond, personne n’en a besoin, de ce foutu bâton.

Maxine se demande ce qu’il faudrait de plus, ce qu’il faudrait de moins pour énerver la prêtresse, la faire brûler comme en enfer, les yeux rouges et la rage en bouche ; à prononcer les vilains mots  et rouvrir les blessures oui Maxine voudrait voir la Yolène cerbère, la Yolène sans artifices. Sans rien d’autre que la peau sur ses os et l’aigreur à son cœur. Ca doit être terrible de sourire sourire sourire sans jamais savoir s’arrêter, la pie la plaint un peu, lui donnerait volontiers le croche-pieds pour l’éclipser. Ah mais le rongeur se tend un peu et l’oiseau jubile car c’est comme ça qu’on vit, comme ça qu’on mord la vie à pleine dents jusqu’à en mettre de partout et adieu ceux qui voudront essuyer les lèvres sur ces visages avides. Peut-être Yolène est-elle plus qu’une prêtresse toute vide qui dit oui oui oui prosternez-vous, aimez-moi, aimez-vous. Peut-être qu’elle dira alors non non non ne ployez pas, levez-vous, envolez-vous.
Maxine elle s’en fout,
elle vole déjà.
Elle battit son propre enfer et s’en fait reine, loin des pierres froides d’un temple que les cœurs ne réchauffent même plus.

Maxine ne doit rien donner Maxine doit tout garder pour elle bien, elle prend l’autre au mot. Gardera même ses propres paroles bien enfouies dans sa gorge. La prend-elle pour une démunie ? Une sans argent incapable d’offrir un pièce ou deux ? Maxine se crispe aussi et les voilà toutes deux froides comme le temple froides comme l’hiver. Froide comme la pierre rouge sang engloutie par le spectre que la pie oublie parfois en se perdant dans les yeux de l’autre.
S’en souvient une fois la nuit tombée, les cauchemars entamés.
Alors elle insulte, elle crache Maxine. Jure d’être le monstre que l’on voudrait voir, le monstre que l’on voudrait détester ; celui des ses tableaux imaginaires qui prend forme le soir sous son lit.
Oh Maxine, Maxine a réveillé un autre monstre peut-être ? Un peu surprise de voir la petite prêtresse répondre, un peu surprise de voir sortir de sa jolie bouche autre chose que des mots tout beau des mots tout propre.

Maxine voudrait sourire, rire, se réjouir. Enfin enfin enfin ce n’est pas trop tôt. Se contente pourtant de garder une mine impassible, de rentrer ses mains dans ses poches avant de les voir finir congelées.
Petite étincelle au fond des yeux verts.
Ça,
Ça, c’est encore mieux qu’une pierre toute rouge.
Ça, c’est éclatant comme une étoile, scintillant comme un morceau d’or.
Ça, c’est la revanche des vivants et les affreux mots qui percent les cœurs.
Maxine la préfère comme ça, Yolène.

« Je n’ai pas besoin de protection. Les démons ça se dompte, ça s’apprivoise. Il faut les choyer comme les enfants et les nourrir comme les animaux. »

Et quand ils vous mangent dans la main, quand ils grognent et baissent la tête alors c’est gagné et c’est comme une armée de ténèbres dans les cœurs fous, dans les cœurs chaque jour un peu plus morts, un peu plus terrifiants sans jamais être à nouveau terrifiés.
Car comme on dit,
il faut un monstre pour tuer un monstre. Un cauchemar pour en éclipser un autre.
Petit sourire amusé sur les larges canines qu’elle n’a pas. Qu’elle la toise oui, qu’elle observe donc la pie de haut en bas car elle n’est guère plus que ce que l’on voit. Juste une gamine paumée au millier de cauchemars entretenus,  juste un oisillon tombé trop tôt du nid, lancé en l’air quand elle ne savait pas encore voler. Alors elle a dû ramper.

Petite grimace vexée aïe ça fait mal. Maxine est inculte Maxine est idiote.
Bon, c’est vrai qu’elle n’a pas fait d’étude.
C’est vrai que le monde ne se prosterne pas à ses pieds.
Et l’autre s’en va comme on abandonne un enfant, Maxine fronce les sourcils et se retourne dans un geste brusque, lui attrape fermement le poignet.

« Je n’ai pas besoin de tout savoir moi, je n’ai pas besoin de pouvoir compter les étoiles dans le ciel ou de danser comme une marionnette devant tous ces fidèles. N’importe qui peut lever un bâton et le fracasser sur un crâne tu sais. N’importe qui peut l’appuyer sur ta carotide et attendre ton dernier souffle. Un bâton ce n’est parfois rien de plus qu’un bâton. » Petit air sincère, sérieux. Peut-être le premier depuis le début de la discussion. « Tu t’appuis trop dessus et bientôt tu ne sauras même plus marcher sans. »

C’est triste et c’est la vérité. Que fera-t-elle Yolène si le spectre devait brûler dans un accident, couler au fond de l’océan ? Que serait-elle alors, prêtresse sans sa baguette magique, prêtresse démunie alors qu’au fond, personne n’en a besoin, de ce foutu bâton.

Maxine se fiche bien de la bienséance, des politesses guindées et des excuses murmurées ; quand l’enfant ne jure que par la colère oh alors la haine se fait reine et Maxine se veut impératrice de sa propre déchéance, pourvu qu’on la voit chuter, que sa dégringolade marque les pavés dorés. Que sa colère (de tout mais surtout d’elle-même) se répande comme la gangrène comme le pollen comme un souffle en été dont tous ont besoin pour se sentir exister. Elle se dit Maxine, que si Yolène explose ça sera sa faute et elle l’aura bien cherché. Si Yolène crache comme un volcan alors elle ne pourra que gonfler la poitrine comme un paon déchu, un peu fier de sa trouvaille, un peu fier d’avoir laissé s’échapper l’impensable. Et s’ils la voyaient tous comme ça la petite prêtresse, les traits crispés et les poings fermés. S’ils la voyaient figée dans un éclat de témérité au lieu de danser comme une belle brise d’été ; alors alors peut-être regarderont-ils leurs pieds en pensant s’être trompés. Est-ce qu’on la traîne Yolène, sur ces sentiers trop pieux trop vicieux,
trop fidèles,
trop cruels.
Est-ce qu’on lui a tracé la route avec les restes du diner, est-ce qu’on la prie d’avancer sans jamais se retourner ? Maxine est heureuse, Maxine a trouvé une belle énigme à élucider et Maxine se languit des beaux jeux de société de son enfance, quand son père avançait son pion en ronchonnant. Sa mère souriant paisiblement. Car Maxine gagne toujours quand il faut réfléchir, quand elle arrête un instant d’être l’impulsivité même et abandonne ses graines de démons sous le tapis.
Alors on ne dit pas non à une énigme, à un labyrinthe d’orties, à une Yolène qui ressemble à une fleur tout en flamme au cœur de glace. Elle taperait bien dans ses mains la pie, sautillerait d’envie car aujourd’hui elle ne s’ennuie pas, elle gagne un rubis (peut-être) et une petite sourie (assurément).

Mais Yolène n’a pas l’air de vouloir jouer non, s’approche pour dominer et la blonde au jean usé ne peut que relever la tête pour ne pas la lâcher des yeux. Recule un peu sans faire exprès mais elle est trop grande et elle trop petite et voilà elle se maudit car son père le lui avait dit,
Finis ta soupe Maxine.
Elle inspire, expire. Ça ne l’amuse plus trop que l’on parle de ses propres démons. Oui elle a commencé, oui elle les a presque dévoilés.
Elle voudrait maintenant ravaler ses mots, rentrer le monstre dans sa cage et qu’on en parle plus. Plus jamais. Car on ne cause pas tripes et boyaux avec les jolies petites prêtresses, pas plus qu’on ne sanglote dans son giron en livrant ses tourments.

« Parfois Yolène, les démons ont simplement déjà tout mangé. Tout dévoré. Parfois Yolène, c’est très bien comme ça, et alors après ils meurent de faim. Qui crois-tu qu’ils dévoreront ensuite ? Les petites prêtresses qui se trémoussent sur scène ? »

Maxine a craché les mots, flamme dans les yeux. Peut-être ses démons à elle ont-ils déjà tout dévoré oui, son cœur ses poumons ses tripes et sa cervelle. Peut-être qu’elle ne s’en rend pas compte mais que lui donneront-ils en échange ces vilains monstres ? Des cornes de diables et des griffes de dragons ? Un trou profond à la place du cœur pour y aspirer les pleurs. Des yeux crevés pour qu’elle n’ait plus à voir les gens se détourner. Une tombe avec son propre nom et elle y écrira elle-même un peu morte mais pas trop.
Yolène est toute blanche toute pure comme une colombe, une parcelle enneigée sous le pin dénudé. Yolène a l’air de penser que se laisser dévorer ne rendra les choses que plus dur encore ; Maxine n’est pas d’accord. C’est parfois plus simple de se dire qu’il n’y a plus rien à attendre plus rien à prétendre.
Mais Yolène ne comprendra pas non non non elle a sa famille elle a son bâton, son nom et ses beaux vêtements vieillots.

Le sceptre vient lui taper la poitrine, Maxine recule d’un pas, fusillant l’autre du regard.
Les paroles font mouche et la pie fronce le nez pour s’empêcher d’exploser (en pleur, en crise, en colère, en ouragan éphémère). Les pieds figés dans la glace comme une statue délabrée. Elle a bien compris oui, elle a bien compris que plus personne n’attendait rien d’elle, qu’on l’avait laissé là dans un coin sans plus jamais prendre la peine d’en vérifier l’état. Qu’on ne reviendrait pas la chercher et qu’elle ne manquerait à personne si ce n’est sa propre famille 6 pieds sous terre grouillant de vers de terre. Est-ce qu’elle sait danser comme une ombrelle et suivre la grâce des artistes ? Certainement pas. Le bâton tape le ventre et Maxine se sent flamber, Yolène attise les braises, Yolène ne devrait pas s’agiter comme ça, lui lancer sa cruauté au visage et son incompétence au cœur qu’elle n’est même plus sûre d’avoir.
Non Maxine ne veut pas danser, non Maxine ne sait rien faire d’autre que se morfondre et se dire qu’un jour ça ira mieux (mais ce jour ne vient pas et Maxine en a marre d’attendre).
Mais Maxine ne dit plus rien elle a la langue figée de colère et les traits crispés d’indignité. Elle lui tend le bâton ? Oh prêtresse sournoise prêtresse cruelle qui pense agiter la brindille devant l’animal. Et alors ? Maxine trop misérable pour pouvoir toucher, elle doit juste regarder ? La pie ne regarde même pas la pierre, trop occupée à fusiller le rongeur du regard.

Et ses démons, c’est quoi ? C’est quoi, c’est qui ?

N’y tenant plus, elle attrape brusquement le sceptre, tire et l’envoie balader un mètre plus loin, s’écraser mollement contre le tat de neige. Elle s’en fou, elle n’en veut plus de cette foutue pierre.
Une seconde plus tard la voilà qui se jette sur l’ennemie de toute ses forces, la plaque contre la poudreuse et vient lui crier au visage.

« On s’en fou de ton bâton personne ne l’aime ton bâton !!! Tu veux les voir mes démons ?? Tu leur diras bonjour de ma part ! »

Maxine toute rouge de colère, elle crie fort, elle appuis encore plus contre le corps sous elle, attrape d’une main brutale la neige toute molle à coté de leurs têtes et en recouvre le visage de l’autre. Là là là elle lui fait bouffer la neige et pitié qu’elle se taise pitié qu’elle se taise et s’étouffe avec ses conneries de fidèles assouvis.