Il était tard lorsque Aesop quittait la fosse, les combats ayant été particulièrement équilibrés ce soir là, ce qui avait amené à d'interminables prolongations. Comme d'ordinaire, il n'avait rien bu, mais la fatigue le faisait parfois un peu tanguer sur le sol pavé. Les transports en commun n'étaient plus disponibles et il avait eu beau attendre une dizaine de minute, aucune calèche ne semblait faire d'heure supplémentaire cette nuit. D'ordinaire, il aurait dû se transformer et trottiner jusqu'à chez lui, empruntant plusieurs passages où les animas les plus imposants ne pouvaient pas se faufiler. Il n'en fut rien par cette nuit encore fraîche d'avril, tandis qu'il restait dans le quartier Brise-Cœur en sortant néanmoins de ses bas-fonds. Malgré son statut, il avait appris à connaître ses ruelles, la faute à un passé tumultueux qu'il cherchait à oublier.
Il devait approcher les 3 heures du matin lorsqu'il rentrait dans l'appartement sans aucune difficulté, par la porte. Daiam avait la fâcheuse habitude de s'enfermer dehors sans prendre le réflexe de se barricader une fois à l'intérieur. Aesop était loin d'être un gros paranoïaque, mais il trouvait le quartier peu recommandable pour se permettre ce genre de liberté et ce, malgré les belles températures qui revenaient. Le coyote ne fit rien pour être discret dans son entrée, cherchant toutefois son compère du regard, au cas où ce dernier se serait endormi autre part que dans sa chambre. Pour la forme, il avait acheté un seul et unique donut, car on lui avait appris de ne jamais venir les mains vides.
C'est moooooi... Tu es réveillé, petit ours ? lâchait-il alors qu'il s'avançait en desserrant légèrement la cravate de son col. C'était fou comme, avec ce genre de comportement, il pouvait lui-même se rappeler l'attitude de Sasha à son égard. Autant donc dire qu'il avait appris de la meilleure quand il s'agissait de se montrer sans gêne. Le carcajou ne pouvait que s'en vouloir à lui-même, ayant choisi de son plein gré de venir en aide à quelqu'un qui avait cherché à oublier le monde entier une brève soirée. Désormais, Aesop faisait en sorte de lui rendre la monnaie de sa pièce. Le canidé s'attendait à ce que son bienfaiteur d'une nuit sorte de son trou, les cheveux en vrac, juste pour constater qu'il aurait peut-être préféré un cambrioleur armé. Il doutait de le trouver en bonne compagnie et quand bien même cela serait le cas, cela ne le dissuaderait pas de rester une heure ou deux. Aussi continuait-il de parler à voix haute alors qu'il jetait un coup d’œil par la fenêtre après avoir déposé le petit sac bien trop léger.
Je t'ai ramené un casse-dalle. J'ai voulu passer à ton travail pour boire un café, mais finalement non. J'aurais dû. Tu en as ici ? Je t'en prépare un ?
daiam est une créature tenant à ses habitudes animal nocturne qui peine à se laisser aller dans les bras de morphée trop longtemps, jusqu’à tard dans la matinée. daiam, sitôt le pas de la porte franchi après une journée de travail, ne tarde jamais à rejoindre son lit pour finir par se lever aux aurores, se retrouver aux portes d’une nouvelle journée qui commence tandis que le monde entier aux alentours croule encore sous le sommeil.
s’il est debout encore plus tôt qu’à l’accoutumée lorsqu’il entend la poignée remuer, la porte grincer carcajou ne réagit pas immédiatement, visiblement peu perturbé quand des bruits de pas s’élèvent non loin, et qu’une voix familière retentit, lui parvient enfin.
ah. aesop. pourquoi n’est-il pas surpris?
s’il le laisse parler tout seul pendant quelques instants, c’est la mention d’un casse-croûte qui le pousse à pointer le bout de son nez.
« ah ouais? t’as apporté quoi? »
tout sourire, toutes canines sorties sans même un bonjour, avec lui c’est toujours la nourriture qui passe avant les bonnes manières ou même le fait d’être présentable puisque c’est en robe de chambre, les cheveux retenus vers l’arrière par un bandeau, un masque de soin étalé sur son visage, qu’il a gardé toute la nuit, n’a pas eu le temps de retirer, qu’il se permet d’apparaître devant lui, peu préoccupé de la façon dont aesop peut bien le percevoir (car lui au moins ne s’est jamais fait surprendre à quatre pattes sur le trottoir, la bile aux lèvres)
« tu te serais pris une porte fermée surtout, si t’y serais allé. je t’en fais un, si tu veux, c’est moi l’hôte, après tout.. » un soupir traverse ses lèvres avant qu’il ne pointe du menton le sofa, comme pour lui indiquer d’aller s’asseoir. « il est trois heures du matin, tu faisais quoi dehors? tu sors d’un bar? t’es bourré, peut-être? ou bien… » ce qui pourrait sonner comme un reproche n’en est pas un, à la façon dont il le jauge, petit sourire en coin. c’est juste qu’à cette heure, les activités sont limitées et s’il devait tenter de deviner, il dirait que celles-ci sont probablement peu recommandables.
« me dis pas que je te manquais à un tel point que tu pouvais pas attendre, qu’il fallait a-bso-lu-ment que tu viennes me voir à cette heure-ci? hm? c’est que je vais finir par me faire des idées quant à tes intentions, au vu de tes visites nocturnes répétées, tu sais? »
la voix qui se veut d’abord sérieuse, finit néanmoins par se briser en petits éclats de rire, les épaules suivent le mouvement et tressaillent, se soulèvent avec amusement. si daiam ne le regarde pas, affairé à préparer le café, il se demande quand même quelle tête il peut bien faire en cet instant.
Aesop n'entend rien dans un premier temps, pourtant il sait qu'il n'est pas seul ici, sa truffe le lui confirme. Négligemment, et par réflexe de curiosité mal placée, il ouvre le frigo pour en analyser le contenu. Il a cette petite faim de la nuit, mécanique, mais il ne mangera rien car il se l'interdit. Il espère peut-être trouver une brique de lait mais abandonne bien vite ses recherches en entendant de l'agitation dans son dos, lorsque monsieur fait enfin irruption dans la pièce. Le coyote dresse une oreille sans se retourner, peu étonné d'avoir le droit à une question avant même une salutations, qu'importe l'heure. À méditer sur lequel des deux était le plus poli.
Un beignet coloré en forme de roue, trouvé dans un distributeur automatique.
Il se retourne enfin vers le carcajou et ne parait pas surpris de le voir dans un tel accoutrement, tartiner d'une crème faciale et aussi méconnaissable que s'il avait passé trois bonnes heures dans la salle de bain. L'escort se contente néanmoins de cligner, n'ayant rien à dire autrement que par son regard doré, un peu dans le jugement. Mais il n'est pas dans ses habitudes de critiquer les manies des gens, surtout lorsqu'ils sont chez eux. Il le dépasse donc sans plus y prêter attention, le laissant ouvrir lui-même le sachet offert si le cœur lui en dit tandis qu'il va se mettre sur le canapé, sans toutefois se laisser lourdement tomber sur celui ci. Après tout, on l'a gentiment invité à le faire. C'est que le canidé connait un peu les lieux depuis le temps et malgré ses bonnes manières, trouve ici le moyen de se détendre un peu. Il étend ses bras sur le dossier mais son dos reste droit tandis qu'il ferme les paupières un court instant.
Je parlais dans la journée... Je sais très bien que votre clientèle est couchée passé 18 heure...
Tout le contraire de la sienne, qui se sent seule lorsque le soleil vint à céder sa place à la lune. Il compte donc expliquer à Daiam pourquoi il est encore debout, à squatter son logis au lieu de dormir depuis près de 4 heures. Parce qu'il a beau être un peu fatigué, il s'est fait invité au restaurant et à jouer les accompagnateurs dans la fosse tout en buvant à frais gratuit. Il s'était fait grassement payé et semblait avoir gagné un client charmé par ses premiers services. Aesop phase un moment, comprenant qu'il s'agit là d'humour et il se tourne à demi vers son compère qui lui tourne le dos. Et après quelques secondes, fini par lui sourire.
J'y ai pensé. Tu as une tenue si affriolante en plus... N'importe quel intrus pourrait se faire des idées.
Il détourne les yeux, tâchant de garder ses remarques pour lui quant au masque nocturne. Avec du recul, il était étonnant que son hôte prenne aussi bien le fait de recevoir la nuit à l'improviste. Donc en venir à ce genre de conclusion était aussi logique que amusant. Le coyote coule un peu plus sur le sofa, laissant quelque peu tomber sa tête en arrière, les yeux fixant un point invisible sur le plafond.
Et non, je ne suis pas saoul. Je ressors de la fosse, les gloutons y sont populaires... Mais le mien préfère se pomponner et servir le thé. C'est trop adorable.
